L’encens, une odeur qui conduit à la vie

Sœur Clémence

L’encens est une résine aromatique qui dégage, en brûlant, une fumée parfumée. Cette résine, obtenue par incision du tronc de divers arbres du genre Boswellia, de la famille des Térébinthacées-Burséracées, provient d’Inde, de Somalie et du pays de Saba (Yémen). Dès l’Antiquité, on l’a mélangée à d’autres ingrédients tels que bois, feuilles, fleurs, huiles essentielles…

Un usage de tradition biblique

L’usage de l’encens parcourt la Bible. Moïse fait fumer, chaque matin et chaque soir, devant le Seigneur et sur son ordre, l’encens aromatique sur l’autel des parfums placé dans le Saint (Ex 30,7-8 ; cf. Lc 1,9-11). Le grand prêtre, au jour des Expiations, pénètre même dans le Saint des Saints pour recouvrir d’un nuage parfumé l’arche d’alliance (Lv 16,12-13). Avec l’encens, c’est la prière du peuple d’Israël qui monte vers Dieu en bonne odeur, comme le chante le psalmiste : « Que ma prière monte vers toi comme l’encens, Seigneur » (Ps 141,2). On trouve aussi cet usage liturgique de l’encens dans le livre de l’Apocalypse : devant l’autel du Seigneur, un ange offre des parfums pour accompagner les prières des saints (Ap 8,3-4). Enfin, lors de l’Épiphanie, les mages eux-mêmes offrent à l’Enfant Jésus de l’or, de l’encens et de la myrrhe, symboles de sa royauté, de sa divinité et de la Passion (Mt 2, 11).

Un geste d’adoration, d’offrande et de prière

Située entre la liturgie d’Israël et la liturgie du ciel, l’Église, elle aussi, offre à Dieu l’encens pour signifier son adoration et sa prière. L’encensement est ainsi un geste d’adoration quand il est offert à Dieu (présent dans les saintes espèces), ou une marque d’honneur dont on entoure les personnes et les objets qui sont offerts à Dieu ou qui lui offrent le sacrifice. À travers l’encensement, c’est toujours Dieu que l’on honore. En encensant les hommes, l’Église honore la créature que Dieu a faite à son image. Ainsi, on encense le prêtre parce qu’il offre le sacrifice eucharistique in persona Christi ; on encense les prêtres et les fidèles parce qu’ils sont les temples du Saint-Esprit et qu’ils offrent sur l’autel de leur vie un sacrifice spirituel. (Le français « encens » vient du latin, incensum qui signifie « ce qui est brûlé », mais le mot encens en latin se dit : thus ou tus et vient du grec thuos qui signifie à la fois « parfum » et « victime » et peut donc contenir cette notion de sacrifice.) Ce qui est encensé est offert à Dieu, consacré. Encenser est un signe d’offrande bien plus qu’une marque d’honneur : honneur d’être offrande montant vers Dieu. L’encens ne constitue donc pas l’offrande, mais il en est le signe. Comme pour le peuple d’Israël, la fumée de l’encens est aussi le symbole de la prière qui monte vers Dieu. Elle appelle le fidèle à l’élévation de sa pensée et de son cœur vers le ciel, et l’invite à se mettre en présence de Dieu.

Une invitation à répandre la bonne odeur du Christ

Le parfum de l’encens rappelle, lui, le parfum du Royaume, « la bonne odeur du Christ » (2 Co 2,15). En offrant l’encens à Dieu, l’Église invite chaque chrétien à « suivre la voie de l’amour, à l’exemple du Christ qui vous a aimés et s’est livré pour nous, s’offrant à Dieu en sacrifice d’agréable odeur » (Ep 5,2), et lui rappelle que, si nous vivons par sa grâce, le Seigneur répandra par nous « le parfum de sa connaissance ». Tous, nous sommes appelés à répandre en tout lieu la bonne odeur du Christ, « une odeur qui de la vie conduit à la vie » (2 Co 2,14-16).
Sources Vives, juin 2014, n° 174