P. BRUNO CAZIN Vice-recteur de l’Université catholique de Lille, médecin hématologue. Journal La Croix du 7 mai 2011.
![]() La présentation du sang du bienheureux pape LJean-Paul II à la vénération des dèles, dimanche dernier, a provoqué interrogations et réactions parfois indignées, y compris parmi les catholiques. Elle s’inscrit pourtant dans la tradition de vénération des reliques de ceux que l’Église propose en modèles aux dèles du Christ. Le corps de ceux qui se sont donnés totalement à Dieu dans le Christ fait signe. Le corps de ceux qui ont vécu dans l’amitié de Dieu n’est-il pas temple de l’Esprit Saint ? Le baptême ne leur a-t-il pas conféré une dignité que rien, pas même la mort, ne saura leur retirer ? Des corps embaumés, des ossements, des cœurs de bienheureux et de saints sont ainsi exposés dans des églises pour encourager la prière des croyants. Le sang l’est plus rarement, même si la ville de Naples s’enorgueillit du sang du martyr saint Janvier, sang qui se liqué e régulièrement lors de célébrations pleines de ferveur. La conservation du sang du bienheureux Jean-Paul II à l’état liquide a été rendue possible par la présence d’anticoagulant dans les flacons de recueil. Le sang avait été prélevé dans la perspective de pratiquer une autotransfusion, pratique parfois proposée pour diminuer les risques transfusionnels lors d’interventions chirurgicales programmées. Cependant, soyons clairs : si remarquable soit la biologie du sang, ce n’est pas sa matérialité qui était proposée à la vénération des dèles, mais le signe d’une vie donnée, jusque dans l’ultime o rande d’une sou rance consentie, sang versé des martyrs, témoins du Christ. Et si le pape Jean-Paul II n’a pas été martyr au sens restreint du terme, il l’a été assurément par sa vie totalement consacrée à Dieu et à l’annonce de l’Évangile. Le symbole est fort, que tous ont perçu, même ceux qui se sont dits choqués par ce choix insolite : le sang, c’est la vie, la vie fragile et menacée par la violence, comme lors de l’attentat dont le pape a été victime en 1981. |
La croyance commune confère aussi au sang une valeur d’identité personnelle. Si la génétique contemporaine sait bien que celle-ci se niche dans la composition originale de l’ADN de nos cellules, le sang conserve symboliquement cette caractéristique. Ainsi, proposer le sang du bienheureux Jean-Paul II à la vénération des dèles était un signe fort, rappelant l’engagement de toute une vie à la suite du Christ. »