Écouter l’homélie du dimanche 8 novembre 2015, à la paroisse Saint Aubin (72), 32° dimanche dans l’année B.
Paroles du pape François avant l’Angelus.
Chers frères et sœurs, bonjour avec ce beau soleil !
Le passage de l’Évangile de ce dimanche comprend deux parties : l’une pour décrire comment ne doivent pas être les disciples du Christ ; l’autre pour proposer un modèle idéal de chrétien.
Commençons par la première : ce que nous ne devons pas faire. Dans la première partie, Jésus attribue aux scribes, maîtres de la loi, trois défauts qui se manifestent dans leur mode de vie : prétention, avidité et hypocrisie. Jésus dit qu’ils aiment « recevoir les salutations sur les places publiques, les sièges d’honneur dans les synagogues et les places d’honneur dans les dîners » (Mc 12,38-39). Mais sous des apparences si solennelles se cachent l’hypocrisie et l’injustice. Tout en se pavanant en public, ils utilisent leur autorité pour « dévorer les biens des veuves » (cf. v. 40), considérées avec les orphelins et les étrangers comme les personnes les plus vulnérables. Enfin, les scribes « font de longues prières, pour l’apparence » (v. 40). Aujourd’hui aussi le risque de tels comportements existe. Par exemple, quand on sépare la prière de la justice, car on ne peut effectivement pas rendre un culte à Dieu et en même temps nuire aux pauvres. Ou quand on dit aimer Dieu, alors qu’on met avant Lui sa propre vanité, son profit personnel.
Et la deuxième partie de l’Évangile d’aujourd’hui suit la même ligne. La scène a lieu dans le Temple de Jérusalem, à l’endroit même où les personnes jettent leurs pièces de monnaie en offrande. Il y a beaucoup de riches qui donnent beaucoup de pièces, puis une pauvre veuve qui n’en met que deux. Jésus observe attentivement la femme et attire l’attention des disciples sur le net contraste de la scène. Les riches ont donné, avec grande ostentation, leur superflu, alors que la veuve, avec discrétion et humilité, a donné « tout ce qu’elle avait pour vivre » (v. 44) ; elle a donc mis plus que tous les autres, dit Jésus. A cause de son extrême pauvreté, elle aurait pu offrir une seule pièce pour le Temple et garder l’autre pour elle. Mais avec Dieu elle ne veut pas faire « moitié-moitié » : elle se prive de tout. Dans sa pauvreté, elle a compris qu’avoir Dieu c’est comme tout avoir ; elle se sent totalement aimée par Lui et l’aime alors, à son tour, totalement. Quel bel exemple nous donne cette petite vieille !
Jésus, aujourd’hui, nous dit aussi que le critère de jugement ne doit pas être la quantité mais la plénitude. Il y a une différence entre quantité et plénitude. Tu peux avoir beaucoup d’argent, mais être vide : ton cœur n’est pas plein. Pensez, cette semaine, à la différence entre quantité et plénitude. Il n’est pas question de portefeuille, mais de cœur. Il y a une différence entre le portefeuille et le cœur… Il y a des maladies cardiaques qui rabaissent le cœur au niveau du portefeuille… Ça ne va pas ! Aimer Dieu « de tout son cœur » signifie avoir confiance en Lui, en sa providence, et le servir en servant nos frères plus pauvres sans rien attendre en échange.
Permettez-moi de vous raconter une anecdote qui s’est passée dans mon diocèse d’avant. Une maman était à table avec ses trois enfants ; le papa était au travail ; ils étaient en train de manger des côtelettes à la milanaise… A ce moment-là quelqu’un frappe à la porte et un des enfants – petits, 5, 6 ans, 7 ans le plus grand – revient et dit : « Maman, il y a un mendiant qui demande à manger. Et la maman, une brave chrétienne, leur demande : — Que faisons-nous ? — Donnons-lui quelque chose, Maman… — Entendu. Elle prend sa fourchette et son couteau et coupe en deux les côtelettes. — Ah non, Maman, non ! Pas comme ça ! Prends dans le frigo. — Non ! Faisons trois sandwiches ! » Et les enfants ont appris que la vraie charité se fait non pas en puisant dans les restes mais dans ce qui nous est nécessaire. Je suis sûr que cet après-midi-là ils ont eu un peu faim… Mais c’est comme ça qu’il faut faire !
Face aux besoins de l’autre, nous sommes appelés à nous priver – comme ces enfants, de la moitié des côtelettes – de quelque chose qui nous est indispensable, pas seulement du superflu ; nous sommes appelés à donner du temps, pas seulement celui qui nous reste mais celui dont nous avons besoin ; nous sommes appelés à donner tout de suite et sans réserve un de nos talents, sans attendre de l’avoir utilisé au profit de quelque intérêt personnel ou de groupe.
Demandons au Seigneur de nous mettre à l’école de cette pauvre veuve, que Jésus, au grand étonnement des disciples, a fait monter en chaire et a présentée comme un « maître » vivant de l’Évangile. Par l’intercession de Marie, la femme pauvre qui a donné toute sa vie à Dieu pour nous, demandons le don d’un cœur pauvre, mais riche d’une heureuse et gratuite générosité.