Connaissez-vous Adrienne von Speyr ?
En 1988, mourait à Bâle, en Suisse, le grand théologien Hans Urs Von Balthasar. Né à Lucerne en 1905, prêtre en 1936, mort quelques jours avant de recevoir la barette de cardinal, il est l’auteur d’une œuvre considérable. La pièce maîtresse en est la trilogie : la Gloire et la Croix – La Dramatique divine – Théologique.
Une grande mystique fut associée à l’élaboration de sa pensée, comme de leur œuvre commune : un Institut séculier d’inspiration johannique et ignatienne. Elle est trop peu connue. C’est Adrienne Von Speyr.
Née en 1902, protestante, médecin, elle vécut deux mariages successifs se terminant par un veuvage, entra dans le catholicisme en 1940, avec la rencontre du P. H. Balthasar. Pendant 25 ans, il sera son confesseur et le témoin de son extraordinaire charisme de prière, de prophétie et d’interprétation des Écritures. Adrienne laisse une œuvre immense : 60 volumes, commentaires verset par verset de l’ensemble du N.T., des Prophètes et des Psaumes.
Cette prodigieuse activité scripturaire et mystique est menée de front par Adrienne Von Speyr avec sa profession médicale, marquée par l’oubli de soi et la compassion sans limites pour autrui. Jusqu’à ce que la maladie et la cécité lui fassent reconnaître et témoigner « la joie de n’avoir plus rien devant soi que Dieu seul ».
Les deux œuvres, celle du théologien et celle de la mystique vont demeurer inséparables comme les « deux moitiés de la même lune ». Adrienne, consumée du désir de voir la Vérité tout entière, réalise sa « pâque » en la fête de sainte Hildegarde de Bingen, illustre médecin et mystique aussi du 13° s., le 17 septembre 1967.
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Dernières paroles ?
Comment cela ?
L’évangile selon saint Jean est organisé en deux parties :
- le livre des signes (12 chapitres), qui opère une nouvelle relecture de la vie publique de Jésus à partir de sept signes soigneusement sélectionnés, dont le premier est le signe de Cana, et le septième le rappel de Lazare à la vie.
- le livre de la gloire (9 chapitres), qui nous communique les confidences faites par Jésus à ses disciples, dans les dernières heures de sa vie terrestre, jusqu’à sa mort ; mais aussi au-delà de la mort, dans les rencontres qu’il a vécues avec eux après sa résurrection.
Dans ce livret que je viens d’achever, ce sont ces toutes dernières paroles de Jésus que nous allons regarder de plus près. Non pas le récit lui-même, mais ces 200 paroles prononcées par Jésus :
◦ paroles du dernier repas et du lavement des pieds
◦ paroles d’adieux où Jésus annonce son retour au Père et la venue de l’Esprit Saint
◦ paroles sur l’Église et la persécution
◦ paroles sur l’oeuvre de l’Esprit-Saint
◦ paroles de sa grande prière
◦ paroles ultimes lors de sa passion et sur la croix
◦ paroles de Vie du Ressuscité…
Pour bien comprendre quel bien précieux nous est légué par Saint Jean de façon très personnelle dans cette seconde partie de son Évangile, il faut redonner quelques points de repères nous permettant d’en saisir la particularité.
Lorsque saint Jean écrit, les lettres des apôtres (Paul, Jacques, Pierre), et les trois évangiles synoptiques, sont déjà rédigés dans leur version finale. Ils forment l’essentiel de notre Nouveau Testament, peuvent être considérés (selon certaines options exégétiques) comme mis par écrit juste avant la chute de Jérusalem en 70, entre 51 et 68.
Avec saint Jean, nous sommes à la fin du premier siècle, environ vingt-cinq ans après la ruine de Jérusalem. Sous le règne de Domitien (vers 95), les persécutions reprennent. De plus, des hérétiques dénaturent le christianisme en prétendant que le Fils de Dieu n’a souffert qu’en apparence (docétisme).
Alors le dernier survivant des Apôtres va réconforter les persécutés et combattre l’hérésie à travers cinq écrits.
- L’Apocalypse, qui dénonce vivement le culte impérial et exhorte à la résistance en dévoilant le sens de l’histoire du monde et en annonçant la victoire définitive de l’Agneau immolé.
- Trois lettres, qui sont envoyées aux chrétiens pour leur rappeler ce qu’est la vraie foi que détruisent les hérétiques.
- L’hérésie ayant fait des progrès, Jean lui oppose son témoignage oculaire dans un nouveau récit évangélique, historiquement encore plus précis que ceux de Matthieu, Marc et Luc. Il décrit la rencontre entre Dieu et l’homme, la lutte entre la vie et la mort et la victoire de l’amour. Il révèle le mystère qu’il a contemplé.
Et il nous donne en particulier le trésor de ces dernières paroles de Jésus prononcées dans les dernières heures de sa vie.
Il faut souligner ici que Jean donne intentionnellement plus d’épaisseur à l’humanité de Jésus pendant ces dernières heures en s’attardant à développer les paroles prononcées, là où les synoptiques étaient quasiment muets. Le style évangélique en général, en effet, est toujours très sobre. Mais ici, Jean développe longuement. N’oublions pas que l’hérésie qui marquait son époque, le docétisme, avait tendance à « gommer » la réalité de l’humanité de Jésus. Jean nous montre un Jésus très humain, très conscient, très soucieux du groupe des Douze, leur laissant ses ultimes consignes.
Le style en est très particulier, spécifique à l’écriture de Jean. Les paroles de Jésus sont donc retranscrites à travers le prisme de la très longue méditation de l’un de ses intimes. La part de saint Jean est indéniable. Et pourtant, il ne s’agit pas d’une révélation privée ou d’un évangile apocryphe, mais de l’un de nos quatre Évangiles canoniques. Pourquoi ? Parce que l’Église nous dit que ces paroles sont vraiment celles de Jésus. Dès le II° siècle, nos quatre Évangiles actuels ont été reconnus par tous.
Voici plusieurs raisons pour lesquelles ces évangiles ont été retenus comme « canoniques », contrairement à d’autres[2] :
◦ ils étaient liés à la génération apostolique,
◦ ils étaient lus dans un grand nombre d’Églises,
◦ ils n’étaient pas utilisés par les hérétiques,
◦ Ils étaient en conformité avec la foi apostolique.
N’ont été retenus que les écrits qui pouvaient se référer au témoignage des apôtres, même si celui-ci est très particulier comme celui de Jean. Jésus le déclare : « Les paroles que je vous ai dites sont esprit et elles sont vie » (6, 63).
Pour mieux accueillir ces dernières paroles de Jésus, je vous en propose une méditation tirée de quatre livres d’Adrienne Von Speyr. Ce ne sont que des extraits, et il y a beaucoup, beaucoup plus, dans le commentaire complet.
Bien sûr, ce n’est pas à lire de manière suivie, mais plutôt à méditer à petite dose, à des moments que vous choisirez. Puissiez-vous en retirer de nombreuses lumières intérieures, et un amour plus grand des paroles de Jésus.