Nur El Din Nassar : fils de musulman, prêtre catholique

Sur le site Famille Chrétienne

EXCLUSIF MAG – D’origine égyptienne, il est devenu prêtre du diocèse de Novare (Italie) et s’apprête à partir comme missionnaire au Tchad.

Sa voix est chaleureuse et posée, son regard franc et intense, ses mots sobres. « Que voulez-vous savoir exactement ? », lance avec un discret sourire Don Nur El Din Nassan, 36 ans. Il vient de raconter son histoire dans le cadre du meeting annuel organisé à Rimini, en Italie, par le mouvement Communion et Libération. Fils d’un père musulman, il a été ordonné prêtre en 2012 et, après quelques années passées dans une paroisse italienne, s’apprête à partir comme missionnaire au Tchad.

D’origine égyptienne, son père rencontre sa future épouse, italienne, catholique et membre des Focolari, dans la gare de Milan en 1978. Leur dialogue est un coup de foudre : ils se marient à l’église trois mois plus tard et s’installent à Domodossola, dans le Piémont. En 1980, naît leur premier fils, Nur El Din. Deux autres suivront.

Sa mère va à la messe et son père prie cinq fois par jour. Leur fils n’est pas baptisé, mais, avec l’accord de son père, il emprunte le chemin suivi par beaucoup d’Italiens : catéchisme, service de messe… Son père attache une grande importance à lui expliquer le Coran. « Il n’y a jamais eu d’affrontement. Cette différence religieuse a toujours été vécue dans une grande liberté. Mon père soulignait les différences entre les religions et cela m’a fourni des éléments pour comprendre ce qui les distinguait. » À 14 ans, raconte Don Nur, « je me trouvais comme quelqu’un dans le désert qui cherche de l’eau. J’avais soif de trouver quelque chose qui remplirait ma vie. Cela a duré trois ans, passés à frapper à toutes les portes. Jusqu’à ce qu’une jeune fille me présente un ami prêtre qu’elle connaissait et qui organisait des rencontres avec les jeunes. »

Cette rencontre le bouleverse tant il entend des paroles qu’il n’a jamais entendues. « En écoutant ce prêtre parler du christianisme, j’ai reçu quelque chose de profondément nouveau, ancré dans le bien, le beau. Cela m’apportait quelque chose de profondément nouveau. J’entendais pour la première fois parler d’une religion qui ne m’imposait pas de faire ceci ou cela, mais qui me demandait simplement de faire confiance à Dieu, qui nous accueille comme nous sommes et est toujours fidèle. » Il est baptisé à 17 ans.

Peu à peu, l’idée du sacerdoce naît en lui. « Le 20 décembre 2004, j’étais en montagne avec un groupe d’amis. J’ai senti une grande joie, qui était aussi une affirmation, un peu comme lorsqu’on rencontre la femme de sa vie. » Son questionnement mûrit auprès de prêtres qu’il interroge, lors des JMJ, ou encore au cours d’une expérience missionnaire en Albanie. Jusqu’au jour où il annonce à ses parents sa décision.

Son père le prend mal. « Il s’est fortement fâché et a souffert. Durant ma première année de séminaire, il ne m’a pas adressé la parole. Lorsque je rentrais à la maison, il s’enfermait dans sa chambre. Par la suite, j’ai appris qu’il avait passé un an à prier en demandant à Dieu de guérir son cœur et d’éteindre sa colère. » Avec le temps, les choses s’apaisent et le dialogue revient. Un échange profond, tant les convictions de son père sont fortes et son questionnement ardent, par exemple sur la Trinité ou sur le célibat.

« C’est important, commente aujourd’hui Don Nur, d’avoir des identités fortes, car cela crée le dialogue ; les identités faibles créent la guerre car personne ne sait ce qu’il est. »

Malgré les difficultés – étudiant en agronomie, il doit se mettre à la philosophie, apprendre le latin, le grec, supporter la vie en collectivité –, il s’accroche au séminaire, année après année. Jusqu’à son ordination, en 2012.

Jean-Marie Dumont