Mgr Joseph Kurtz, ancien président de la conférence épiscopale américaine et lui-même frère d’un trisomique, a déploré la décision du Conseil d’État, en France, de censurer la campagne de sensibilisation à la trisomie 21 « Dear Future Mom ». / Patrick Semansky/AP
Le 10 novembre dernier, le Conseil d’État a validé la décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) de juin 2014, de censurer la diffusion à la télévision d’un spot de sensibilisation à la trisomie 21.
Le CSA avait estimé que le clip « Dear future Mom », (« Chère future maman »), financé par une dizaine d’associations en Europe, dont la fondation Jérôme Lejeune, « était susceptible de troubler en conscience des femmes qui, dans le respect de la loi, avaient fait des choix de vie personnelle différents » que de garder l’enfant à naître.
Sept jeunes trisomiques avaient alors introduit un recours devant le Conseil d’État, considérant que la décision du CSA était une atteinte à la liberté d’expression, avant d’être déboutés.
Outre-atlantique, cette décision de la justice française a ému l’ancien président de la conférence épiscopale américaine, qui l’a fait savoir dans une tribune publiée sur le site Crux, mardi 22 novembre. Mgr Joseph Kurtz, archevêque de Louisville (Kentucky), vient tout juste de quitter ses fonctions au terme d’un mandat de trois ans à la tête de l’Église américaine.
Dans cette tribune, il se dit « attristé mais pas surpris » de la décision du Conseil d’État. Selon lui, cette vidéo est « à voir absolument », car elle « contredit beaucoup des stéréotypes anciens et infondés sur les personnes trisomiques ».
Ayant lui-même eu un frère atteint de trisomie 21, aujourd’hui décédé, Mgr Kurtz est spécialement concerné par cette question. Lors de son dernier discours devant les évêques américains, comme il le rappelle dans son texte, il avait d’ailleurs tenu à raconter, parmi les images marquantes de son mandat, sa rencontre avec un enfant trisomique réfugié, en Ukraine.
Un frère atteint de trisomie
« Je sais que les parents qui reçoivent un diagnostic prénatal de trisomie 21 sont effrayés, et je ne peux leur enlever cette peur et cette inquiétude », écrit-il. « Mais je peux partager ma propre expérience vécue avec mon frère George, né trisomique. »
L’archevêque raconte alors brièvement l’histoire de son frère, dont il fut le tuteur légal après la mort de leur mère. « À l’âge de 48 ans, il est venu vivre avec moi au presbytère, en Pennsylvanie, et a déménagé avec moi lorsque j’ai été nommé évêque de Knoxville, Tennessee », indique-t-il. « Au presbytère, George contribuait d’innombrables manières (…) Il devint un collaborateur estimé et nous manquait grandement lorsqu’il partait en vacances », relate-t-il encore. « Il me réconfortait après une journée difficile, il a partagé ma peine lors du décès de notre mère, et il m’aidait à mettre les choses en perspective. (…) Dans cette relation avec mon frère, ce n’est pas un cliché de dire que j’ai reçu plus que je n’ai donné », assure-t-il. « Mon frère est mort en 2001 et il me manque tous les jours. »
« Tragiquement, à travers le monde, on estime que 90 % des grossesses avec un diagnostic de trisomie 21 se terminent par un avortement », déplore Mgr Kurtz, avant d’encourager « toutes les familles qui ont reçu ce diagnostic pour leur enfant à naître à regarder cette vidéo ». Et l’ancien président des évêques américains dit son espoir que ce petit film les « aide à mieux comprendre les dons merveilleux et le potentiel des personnes trisomiques ».