Ils choisissaient les premières places
Jésus ne peut que remarquer la conduite des vaniteux et des orgueilleux. Ils choisissent les premiers divans aux repas, les premières places… Nous vivons tous sous l’emprise de notre amour-propre, plus ou moins cultivé ou combattu selon les cas. Voilà un terrain de conversion proposé par Jésus : la recherche du prestige personnel ne peut avoir sa place dans le cadre du service de Dieu. Cette conversion est prioritaire si nous voulons suivre les traces de Jésus dans sa démarche d’incarnation.
Prendre la dernière place
Le refrain qui parcourt cet évangile, prendre la dernière place, souligne une attitude fondamentale que Jésus seul est en droit d’exiger. Vous connaissez cette parole attribuée à l’abbé Huvelin qui accueillit Charles de Foucauld en confession : « Dieu a tellement pris la dernière place que personne ne pourra jamais la lui ravir ». En effet, Jésus a pris la dernière place, de Bethléem au Golgotha. Quand il nous demande de vivre de cet esprit, il peut nous l’imposer ou nous le suggérer.
Plein de honte
S’il nous l’impose, c’est pour notre bien, pour déraciner l’amour-propre, par des situations d’humiliation personnelle, ou même publique (et dans ce cas avec délicatesse). L’humiliation est une pédagogie divine chargée de nous mener à l’humilité. À chacun de nous de faire l’inventaire dans sa propre vie des situations d’humiliation que nous avons reçues comme venant de la main du Seigneur (discernées dans le rétroviseur de la relecture). L’humiliation, qui engendre la honte, est comme une brûlure au fer rouge qui met en évidence l’amour-propre, un signal « stop » pour faire demi-tour sur un cheminement en cours.
Va te mettre à la dernière place
Lorsque l’Esprit Saint nous suggère de prendre la dernière place, ou plutôt lorsque nous entendons enfin qu’il nous le suggère, nous vivons alors un abaissement consenti, qui n’est pas une humiliation, mais une suite du Christ dans son abaissement. Cette attitude nous procure la paix, elle nous construit dans l’axe de notre baptême au niveau de nos comportements. Nous commençons alors les « descentes » successives qui nous mèneront à l’humilité, à travers des combats où il faudra vaincre la rébellion de la nature qui réclame son dû… On dit souvent que l’orgueil mourra un quart d’heure après notre propre mort…
Mon ami, avance plus haut
C’est seulement sur cette base que le Seigneur pourra un jour prononcer la parole « mon ami, monte plus haut ». Mais il ne faut pas se leurrer. Jésus l’a entendue après sa mort sur la croix. En le ressuscitant dans la puissance de l’Esprit, le Père lui a dit : mon Fils, monte plus haut… Ne soyons donc pas surpris de ne pas l’entendre très fréquemment, voire pas du tout. Et n’imaginons pas qu’une quelconque prise de responsabilité soit assimilable à cet appel… Le poison du prestige, sous forme de gel ou de mousse, est toujours d’origine diabolique, comme la tentation du pinacle nous le révèle.
L’abaissement, remède aux abus de pouvoir
Cet appel est bien actuel. Le pape François, dans sa Lettre au peuple de Dieu du 20 août 2018, pointait un exercice déviant de l’autorité dans l’Église, qui s’est traduit par des abus de pouvoir et de conscience, et des abus sexuels. Il invite chacun de nous, vous et moi, à une grande transformation : « Il est nécessaire que chaque baptisé se sente engagé dans la transformation ecclésiale et sociale dont nous avons tant besoin. Une telle transformation nécessite la conversion personnelle et communautaire et nous pousse à regarder dans la même direction que celle indiquée par le Seigneur. » C’est donc conscients de la gravité de la situation de l’Église, qu’il nous faut résolument progresser sur le chemin de l’abaissement.
→ Pour approfondir : « L’abaissement, remède aux abus de pouvoir », petite école biblique n° 58.