Carlo Caffara , né en 1938, est archevêque de Bologne depuis 2003. Il a été créé cardinal par Benoît XVI lors du consistoire du 24 mars 2006.
Au sein de la Curie romaine, il est membre de la Congrégation pour l’évangélisation des peuples, du Tribunal suprême de la Signature apostolique, du Tribunal de la Rote romaine et de l’Académie pontificale pour la vie.
Voici l’homélie qu’il a prononcée ce dimanche en la fête de la Sainte Famille 30 décembre 2012 Sur le site benoit-ert-moi
La première lecture (1 S 1, 20 ss.) nous donne une grande leçon, et de dramatique actualité. Elle commence par la constatation d’un fait commun: «Anne conçut et enfanta un fils et lui donna le nom de Samuel».
Mais cette femme en donne l’interprétation la plus profonde: «Du Seigneur, je l’ai obtenu».
L’existence de cet enfant ne trouve pas son explication ultime dans le concours de lois biologiques, mais dans une libre décision du Seigneur: c’est un don du Seigneur à une femme qui le lui demandait comme une grâce.
La conséquence qu’Anne tire de tout cela est la suivante: «Le Seigneur m’a accordé la grâce que je lui ai demandée. C’est pourquoi je vais à mon tour en faire don au Seigneur: tous les jours de sa vie, il est cédé au Seigneur».
Cet enfant, sa personne ne peut être considérée simplement comme le fruit du sein de sa mère, une sorte de propriété exclusive. Elle le cède au Seigneur pour toujours. Cette page spendide a une analogie profonde avec la narration évangélique.
Le moment central du récit est le dialogue entre Jésus, âgé de douze ans, perdu et retrouvé dans le temple, et sa mère Marie (Lc 2, 41-52).
Arrêtons notre attention sur la réponse de Jésus: «Pourquoi me cherchiez-vous? Ne savez-vous pas que je dois m’occuper des choses de mon Père?».
Jésus, en premier lieu, s’étonne devant un fait que, comme Marie et Joseph, nous considérons normal: ayant perdu leur fils, il ne peuvent que se mettre à sa recherche avec une grande anxiété. Quelle est la raison de l’étonnement de Jésus? C’est ici que nous touchons le cœur de l’Évangile d’aujourd’hui.
Jésus se trouve là où il doit être, où il ne peut pas ne pas être: dans «les choses du Père». Il révèle qui est son véritable père. Ce n’est pas Joseph. C’est une autre, Dieu Lui-même. «Je lui appartiens»: c’est comme si Jésus disait: «Je ne peux me trouver, comme fils, que dans la maison de mon Père». Et Jésus utilise un verbe très fort: «Je dois». Dans les évangiles, le mot est utilisé en référence à une disposition du Père envers Jésus, à laquelle il obéit. Jésus nous révèle donc une appartenance bien plus forte que celle qui le lie à Marie, et bien sûr à Joseph.
J’ai dit que l’enseignement sur quoi convergent la première lecture et le passage de l’Evangile est d’une actualité dramatique aujourd’hui. Pour de nombreuses raisons, sur lesquelles je ne peux pas m’étendre beaucoup, mais que je veux au moins mentionner.
C’est désormais la conviction de beaucoup que l’enfant ne peut pas être simplement «attendu», mais doit être «voulu». Bien sûr, derrière ce changement de perspective, il peut y avoir cette attitude que l’Eglise aussi recommande quand elle parle de la procréation responsable. Mais normalement, à preésent, ce n’est pas de cela qu’il s’agit. Et la relation du parent avec l’enfant «voulu» est profondément différent de la relation avec l’enfant «venu» [cf A. Polito, Contro i papà , Rizzoli, Milan, 2012].
La différence réside dans le fait que l’enfant «voulu» risque d’être considérée non pas comme quelqu’un, mais comme quelque chose dont j’ai désormais besoin pour mon bien-être psychologique. Le passage ultérieur vers la vision cohérente de l’enfant comme un «bien» est, dans cette logique, un risque très réel. Exactement le contraire de ce que dit aujourd’hui la parole de Dieu.
La conséquence la plus grave de ce changement culturel profond dans la relation parents-enfant, c’est que le couple s’attribue l’autorité de porter un jugement sur le droits on non à l’existence de l’enfant conçu, mais non voulu. On a ainsi légitimé la suppression de celui-ci, sur la base de l’idéologie «en faveur du choix» [pro-choice].
Mais dans le même temps – et ce n’est qu’une contradiction apparente avec ce que je viens de dire – si le rapport juste est seulement avec l’enfant «voulu»; s’il devient quelque chose de nécessaire pour leur propre bonheur, alors toutes les techniques qui peuvent produire l’enfant voulu sont légitimées. Et le produit est à la sisposition du producteur.
Chers frères et sœurs, Je voudrais conclure en attirant votre attention sur un détail du récit évangélique. En parlant de Marie et de Joseph, l’évangéliste dit, «ils ne comprirent pas ce qu’il leur avait dit», et de Marie, il ajoute: «Sa mère gardait toutes ces choses dans son cœur»
Vous pouvez voir le chemin de la foi de Marie. Elle n’est pas en mesure de pénétrer le sens des paroles de Jésus, mais elle ne les refuse pas pour autant. Au contraire, elle les conserve dans son cœur, les méditer, jusqu’à en être pleinement illuminée.
Dans une culture où l’origine d’une nouvelle personne humaine n’est plus comprise dans son sens le plus profond, non pas un don de Dieu, mais le résultat aléatoire de lois biologiques de plus en plus soumises à la maîtrise technique de l’homme, gardez dans votre cœur la Parole qui aujourd’hui vous est dite, ainsi vous serez de vrais témoins de la vérité sur l’homme.