La guérison dans la maison

(5° D. TO. B — Mc 1, 29-39) Durant cette « journée à Capharnaüm », Marc nous promène en quatre lieux : la mer, la synagogue, la maison, le lieu désert. Un lieu de travail, un lieu de culte, un lieu de vie domestique, un lieu de solitude spirituelle. En quelques versets seulement, Marc dessine le portrait d’un Jésus en mission.

De la synagogue à la maison

Après la synagogue du village, nous ne quittons pas Capharnaüm où nous allons passer une journée et une nuit, Marc enchaîne très rapidement les événements. Et hop, à la maison où l’on évoque la belle-mère1 fiévreuse ! Et hop, il la guérit et elle fait le service ! À l’autorité de sa parole succède maintenant l’autorité de son action. Le règne de Dieu qu’il annonçait en enseignant (1,14-15.21) s’accompagne de faits bien réels : des gestes de vie, de miséricorde.

Maison fraternelle et ecclésiale

L’annonce du règne déborde jusqu’au sein de la maison, jusqu’au lit d’une femme malade qui ne pouvait être à la synagogue. L’Évangile se déplace vers la maison de la souffrante. La maison de Simon et André se présente comme un nouveau lieu de mission. En Marc, elle deviendra un lieu de rendez-vous habituel. (Les premiers chrétiens juifs, exclus de leurs synagogues et se rassemblaient dans leurs maisons). Mais pour nous, ce texte nous invite à ne pas enfermer l’Évangile dans un cadre exclusivement liturgique et à le vivre jusque dans notre quotidien. Dans notre maison, notre famille, notre fratrie ecclésiale.

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Maudite fièvre

Ils lui parlèrent d’elle. En venant demeurer dans la maison, Jésus entend l’intercession des disciples et frères en faveur de celle qui souffre de fièvre. Il s’agit d’une fièvre brûlante que l’on doit prendre avec sérieux en ce premier siècle. La femme souffre d’une maudite fièvre, de celle dont Dieu use lui-même pour avertir ceux qui désobéissent à sa Loi : Le Seigneur te frappera de langueur, de fièvre, d’inflammation, de chaleur brûlante… (Dt 28,22)2. Alors que maladie et malédiction divine risquent de se confondre, les gestes pacifiques de Jésus manifestent que sa guérison tient lieu de restauration, de retour en grâce, de résurrection.

Des gestes simples

Une fois encore, Marc décrit les gestes de Jésus de la manière plus ordinaire : s’approcher, prendre la main, et faire lever. Nulle mise en scène sensationnelle. Jésus ne prononce pas une seule parole, pas même une prière. Cette pauvreté et ce silence expriment la délicatesse efficace de Jésus envers l’impure malade et couchée. Et maintenant la voilà debout, relevée de son mal, bien vivante, pour les servir. Jésus redonne vie et vigueur en vue d’un bien qui dépasse la personne : elle devient humble servante, pas même sujette d’éloges ni de louanges, faisant bénéficier de son retour à la vie toute la maisonnée. La guérison d’un seul sert la vie de tous.

Une publicité à bas bruit

En mettant fin à ces maudites maladies et en chassant les démons, Jésus vient rétablir l’humanité dans un corps sain, un esprit sain, mais surtout dans la sainteté. Un règne nouveau commence où le Messie évacue les maux les plus divers qui rongent l’humanité. N’est-ce pas aussi la période ecclésiale que nous vivons ? Et la contagion n’est plus celle des maux, mais du règne de Dieu. Les ne viennent pas d’eux-mêmes. On lui amenait malades et démoniaques. La foi en Jésus ouvre à une espérance nouvelle et à une charité inattendue, où le merveilleux est contenu « il empêchait les démons de parler »… pour mieux contempler cette grâce du Christ.

Un rythme qui exige prière et discernement

C’est le matin, encore sombre. Jésus part pour le désert, le lieu de la parole divine (1,1-13). Sa prière, son lien au Père céleste, n’est pas de l’ordre de l’ostentatoire mais de l’intime. Du nécessaire, aussi, pour s’orienter dans sa « sortie ». Jésus a forcé la porte pour s’éclipser. Déjà, il manque aux siens. Ils le poursuivent. Ce n’est pas seulement une simple recherche, mais une véritable quête. Cependant, il est capital qu’une finalité soit maintenue : chercher Jésus plus encore que la guérison… Et du côté de Jésus, c’est le rythme haletant de la mission qui se met en place. C’est bien pourquoi tout cela exige impérativement les respirations silencieuses de la prière et du discernement.

Malheur à moi si je n’annonçais pas l’Évangile !

1Voir mon article « L’apôtre Pierre était-il marié ? »

2Ce terme fièvre, en grec pyretos/πυρετός, n’est utilisé qu’une fois dans l’Ancien Testament en Dt 28,22.