Maladie de Charcot : Olivier Goy, l’invincible

Texte : Journal La Croix du 31 mai 2023

L’entrepreneur de 49 ans est atteint par cette pathologie neurodégénérative incurable depuis décembre 2020. Il a décidé de raconter son combat dans le documentaire Invincible été, attendu en salles le 31 mai.

Toutes les quatre-vingt-dix minutes, un nouveau cas de sclérose latérale amyotrophique (SLA), le nom savant de la maladie de Charcot, est diagnostiqué dans le monde. Pour Olivier Goy, 49 ans, l’annonce est tombée le 8 décembre 2020. Comme un couperet.

Car la SLA, pathologie neurodégénérative incurable, n’est pas seulement la plus fréquente des maladies rares – entre 7 000 et 8 000 patients en France et 1 800 nouveaux par an –, c’est aussi l’une des plus terribles : elle se traduit par une paralysie inéluctable de tous les muscles qui conduit à une mort par étouffement dans un délai court, trois ou quatre ans en moyenne.

En quelques minutes, ce brillant entrepreneur à la tête d’October, une société financière en pleine croissance ; cet homme comblé, marié et père de deux jeunes garçons ; ce grand gaillard savoyard, adepte de tennis et de vélo, voit son monde s’écrouler. « J’ai pleuré comme un enfant », confie-t-il sobrement. Il lui faudra quelques mois pour tout reconstruire sur de nouvelles bases. « On m’a dit que j’allais mourir. J’ai décidé de vivre. »

 

Le 21 mars 2021, Olivier Goy décide de se confier au micro de Matthieu Stefani, producteur de « Génération Do It Yourself ». Le podcast est habituellement consacré aux chefs d’entreprise qui viennent raconter leurs succès. Dans l’épisode 181, intitulé « La Vie, la mort, le dépassement », Olivier Goy casse les codes pour témoigner, une heure et demie durant, de l’épreuve qu’il traverse et de la philosophie qu’il s’est donnée pour la surmonter.

« Je ne vais pas regarder l’Olivier que j’étais ou me projeter dans le futur avec des questions qui angoissent. Je me concentre sur le présent. Je vis le jour J. Je profite de tout, tout simplement », raconte-t-il d’un ton direct et étonnamment léger. Ce « coming out » peu habituel dans les milieux d’affaires va déclencher une vague de sympathie qu’il n’attendait pas. « Je me suis aperçu qu’il y avait tellement de gens en souffrance », lâche-t-il.

Depuis, Olivier Goy se considère « en mission » et se dépense sans compter, malgré la progression de la maladie qui le contraint au fauteuil roulant et l’empêche peu à peu de s’exprimer. « Elle veut me bâillonner, mais je continuerai à me battre contre la fatalité pour préparer l’avenir », confiait-il à La Croix en avril, en marge du colloque organisé par l’Association pour la recherche sur la sclérose latérale amyotrophique (ARSLA).

Une de ses premières victoires a été d’obtenir du président Macron, rencontré fin février, l’engagement à rembourser à 100 % les fauteuils roulants. « Mais le chemin reste long ! Il y a tant à faire ! », plaide-t-il sans perdre le sourire qui illumine son regard bleu-vert.

Pas question, en revanche, de perdre ses forces dans la polémique en cours sur la mise en avant de la maladie de Charcot par les partisans de la légalisation de l’euthanasie. « Le débat sur la fin de vie est extraordinairement complexe. La décision ultime dépend tellement de l’histoire de chacun. Je m’abstiens bien de juger les choix individuels, même si j’aime intensément la vie », tranche-t-il en tapotant sur sa tablette.

Son combat, plus large, est de libérer la parole sur les tabous du handicap, de la dépendance et de la mort. « Mon but est d’éveiller les consciences et de changer le regard que l’on porte sur soi et sur les autres, que l’on soit malade ou pas. Mon message est simple : la vie est belle, vraiment belle, pour peu qu’on apprenne à en profiter, sans regretter hier et sans avoir peur de demain. »

Pour le faire passer auprès du plus grand nombre, Olivier Goy a accepté de raconter son histoire dans Invincible été, réalisé par Stéphanie Pillonca et attendu en salles le 31 mai. Un film solaire qui mouille parfois un peu les yeux, mais c’est sans doute pour laver notre regard. Et après ? La réponse est donnée en post-scriptum du film : « Du cinéma au cimetière, il n’y a qu’un pas. Mais je n’ai pas peur. Pour apprendre à vivre, il faut apprendre à mourir. »

Une quête de sens sur la maladie et la mort

« Au milieu de l’hiver, j’apprenais enfin qu’il y avait en moi un été invincible. » Cette citation d’Albert Camus donne son titre au film que Stéphanie Pillonca consacre au combat d’Olivier Goy contre la maladie de Charcot. Invincible été saisit avec délicatesse le quotidien d’un patient confronté à la lente dégradation du corps, la souffrance de ne plus pouvoir se faire comprendre alors que les facultés intellectuelles restent intactes, la difficulté des proches à affronter l’inéluctable. Œuvre engagée, le film invite à travers des rencontres – du photographe Sebastiao Salgado à la femme rabbin Delphine Horvilleur – à une quête de sens sur la maladie et la mort. « De la beauté, des rires, quelques larmes : une ode à la vie et à l’amour », résume Olivier Goy. Sortie en salles le 31 mai.