Saintes Félicité et Perpétue, martyres

Perpétue est une jeune patricienne, Félicité une jeune esclave. Elles avaient toutes deux demandé le Baptême à l’Évêque de Carthage. L’empereur Septime Sévère ayant interdit le Christianisme, le groupe des catéchumènes, dont elles faisaient partie, est arrêté, avec Sature, Saturnin, Révocat et Secondule.

Pendant plusieurs mois, ils connurent la prison dans des conditions très dures, d’autant qu’ils étaient dans l’incertitude du sort exact qui les attendait. Félicité était enceinte et Perpétue, jeune mariée, allaitait son enfant. Le père de la jeune femme tenta en vain de la faire sacrifier aux dieux au nom de l’amour maternel.

Quant à Félicité, elle mit au monde une petite fille dans sa prison. Trois jours après la naissance, elle était martyrisée et l’enfant fut adoptée par une Chrétienne de la ville. Comme leurs compagnons, Perpétue et Félicité furent livrées aux bêtes du cirque, enveloppées dans un filet, et livrées à une vache furieuse.

Elles attirèrent la pitié des spectateurs devant ces jeunes mères torturées. On les acheva en les égorgeant. Selon les « acta » de leur martyre, des témoins disaient : « Leur visage était rayonnant et d’une grande beauté. Il était marqué non de peur mais de joie. »

Le culte des deux jeunes femmes connut très vite une grande popularité : leur jeunesse, leur situation de mère de famille, leur courage, le fait qu’elles soient des catéchumènes les font figurer en tête des martyres mentionnées dans la première Prière Eucharistique de la liturgie latine. Elles sont fêtées par les Église d’Orient le 1er Février.

ACTES DES MARTYRS DE CARTHAGE 203

« Le jour se leva, où les martyrs allaient remporter la victoire, et ils sortirent de la prison pour s’avancer vers l’amphithéâtre comme s’ils allaient au Ciel. Ils avaient des visages gais et radieux, et s’ils tremblaient, c’était de joie, non de peur. Perpétue, la première, fut frappée par les cornes d’une vache furieuse et tomba à la renverse. Puis elle se releva et voyant que Félicité avait été précipitée sur le sol, elle s’approcha, la prit par la main et l’aida à se redresser. Toutes deux demeurèrent debout.

La cruauté du peuple s’apaisa et on les fit sortir par la porte des Vivants. Là, Perpétue fut accueillie par un certain Rustique, alors catéchumène qui était à son service et, comme si elle sortait du sommeil (tellement elle avait été ravie en extase), elle se mit à regarder autour d’elle et dit, à la surprise de tous : ‘ Quand donc serons-nous exposés à cette vache dont on parle ? Et quand elle apprit que cela avait déjà eu lieu, elle ne le crut pas avant d’avoir reconnu sur son corps et sur ses vêtements les marques des coups. Alors, après avoir appelé son frère et ce catéchumène, elle les exhorta ainsi :

Demeurez fermes dans la Foi, aimez vous tous les uns les autres, et ne soyez pas ébranlés par nos souffrances ’. De même, Saturus, à une autre porte, s’adressait ainsi au soldat Pudens : ‘Finalement, comme je l’avais pensé et annoncé par avance, je n’ai vraiment rien souffert d’aucune bête jusqu’ici. Et maintenant, crois de tout ton cœur: voici que je vais au-devant du léopard, et par une seule de ses morsures je parviens au but ’. Et aussitôt, à la fin du spectacle, il fut livré à un léopard. A la première morsure, il fut tellement inondé de sang que le peuple, lorsqu’il revint, cria, comme si l’on était aux bains : ‘ Baigne-toi et bonne santé ! Baigne-toi et bonne santé ! ’

Ce cri témoignait qu’il avait reçu le second Baptême, celui du sang. Et, certes, après un tel bain, il avait trouvé le Salut. Alors il dit au soldat Pudens : ‘ Adieu, garde mon souvenir et garde la Foi. Que tout cela, au lieu de t’ébranler, te fortifie ’. En même temps il lui demanda l’anneau qu’il portait au doigt et, après l’avoir plongé dans sa blessure, il le lui remit en héritage, lui laissant cette relique, ce mémorial de son sang.

Puis, comme il est inanimé, on le jette avec les autres dans le local où l’on devait les égorger. Mais, comme le peuple les réclamait au milieu de l’arène pour être témoin oculaire de leur mise à mort en voyant l’épée s’enfoncer dans leurs corps, ils se levèrent d’eux-mêmes et se portèrent à l’endroit voulu par le peuple. Mais d’abord ils s’embrassèrent pour achever la célébration de leur martyre par le rite du baiser de Paix. Tous reçurent le coup d’épée, immobiles et silencieux; en particulier Saturus qui rendit l’esprit le premier, lui qui était monté le premier à l’échelle de la vision de Perpétue, pour attendre celle-ci.

Quant à Perpétue, ce fut elle qui conduisit elle-même à sa gorge la main encore novice de cet apprenti. Mais, que ce soit par pitié ou par manque d’expérience, celui de Perpétue ne sait pas tuer. Il la blesse sans atteindre le bon endroit. L’épée du gladiateur s’arrêta entre ses côtes, et lui fit pousser un grand cri. « Mon frère, ici, laisse-moi t’aider », dit-elle d’un filet de voix accompagné d’un très doux sourire.

Après avoir appuyé la pointe de l’épée contre la carotide droite, elle dit alors : « Jésus, je me confie à toi ! Pousse, mon frère. Je te Bénis », et elle tourne la tête vers l’épée pour aider le gladiateur inexpérimenté et troublé. Sans doute une telle femme ne pouvait-elle être mise à mort autrement, elle qui faisait peur à l’esprit mauvais: il fallait qu’elle-même le veuille ».