A propos du « genre », Remarques d’une caractérologue par Marie-Madeleine Martinié
« Qu’est-ce que tu penses du genre Grand’mère ? » m’a demandé une de mes petites-filles. Alors à elle et à ses cousines (élèves de 3e, de 1ère, de philo) j’ai proposé un éclairage par la caractérologie. Et nous avons travaillé ensemble pendant plus de deux heures sur la question… dont elles ont beaucoup reparlé ensemble ou avec moi pendant leurs vacances.
La caractérologie est une méthode de connaissance et d’acceptation de soi et d’autrui grâce à laquelle j’ai pu, pendant quarante années aider des couples à ne pas divorcer, des parents à ne pas désespérer de tel de leurs enfants, des jeunes à ne pas se fourvoyer dans de fâcheuses aventures professionnelles et autres… et parfois des filles à accepter de n’être « que » des filles.
1. Que dit la caractérologie ? Ses postulats sont des lieux communs : « Nous ne sommes pas tous pareils. » et « Notre personnalité dépend largement de notre histoire. »
Son originalité est de considérer que le caractère est un donné, et que, imprévisible et immuable, ce donné est, comme les fondations d’une maison ce sur quoi se bâtit notre histoire (et particulièrement notre éducation). Autrement dit : « L’inné persiste sous l’acquis. »
Bien banales ces affirmations. Mais bien oubliées par tous les « historicistes », les psychanalystes purs et durs (pour qui tout s’explique par la petite enfance) et par les ténors du socioprofessionnel pour qui tout retard scolaire comme toute délinquance naît de la situation « défavorisée » des parents.
La caractérologie, qui n’est pas née d’une idéologie mais d’observations patientes, paraît parfois simpliste alors qu’elle est simple. Jugez-en. Elle dit : « Nous sommes tous doués d’émotions. » Mais entre l’hyperémotif qui, comme un peuplier, vibre au moindre souffle et le non-émotif, stable comme le cèdre et qui ne s’émeut que dans la tempête, que de degrés ! Elle dit aussi : « Nous nous sentons tous capables d’agir. » Mais entre l’hyperactif qui se trouve toujours quelque chose à faire, et celui qui n’agit guère que si le besoin l’y oblige, que de différences. Un dicton populaire dit : « Ce sont toujours les mêmes qui font tout. » Ce qui est bien loin de signifier que ce sont les actifs qui seuls mènent le monde, car des non-actifs peuvent agir beaucoup, s’ils se donnent ou si on leur donne des raisons extrinsèques d’agir. Ce sont eux qui savent s’ils agissent malgré la difficulté d’agir ou pour la seule joie d’agir.
Enfin la caractérologie s’intéresse à la longueur du retentissement des émotions. Elle emploie malheureusement pour en parler deux termes (primarité, secondarité) dont le sens banal a une connotation culturelle gênante.
2. Un primaire (qui peut-être professeur à l’ENA,) c’est quelqu’un dont l’émotion ne dure qu’un premier moment : une minute pour un incident minuscule, une année pour un fait très grave. Un secondaire c’est quelqu’un pour qui tout dure (une heure pour un incident minuscule, 20 ans pour un fait grave, et parfois la vie entière !)
Ces trois facteurs fondamentaux, Emotivité (E ou nE), Activité (A ou nA), Retentissement (P, S) groupés 3 par 3 donnent huit types principaux : EAP, nEAP, nEnAP, nEnAS, etc. dont les formules sont des repères commodes non des étiquettes immuables.
Et dans chacun de ces types on trouve, statistiquement autant de femmes que d’hommes.
On trouve aussi autant de femmes que d’hommes lorsqu’il s’agit de largeur ou d’étroitesse de champ de conscience. (Les étroits, quel que soit leur niveau d’intelligence ne font qu’une chose à la fois, et n’ont de conscience que pour ce qu’ils font au moment où ils le font ; pour les larges, y compris les moins doués intellectuellement, c’est l’inverse.) L et nL peuvent être femmes ou hommes.
Les choses se compliquent un peu pour la « polarité mars ou vénus ». Les « mars » attaquent de front la difficulté, ou l’adversaire. Les « vénus » contournent l’obstacle et cherchent toujours à convaincre plus qu’à vaincre l’adversaire. Et, malgré les apparences (dues au fait que socialement on rit des couples où la femme « porte la culotte » et que l’on approuvait jusqu’à la révolte des féministes, les femmes d’apparence docile) il n’y a pas de différence statistique entre hommes et femmes pour la polarité.
Il en va autrement pour ce qui est de la tendresse. La tendresse qui n’a RIEN de commun avec l’émotivité. On peut être émotif et non tendre et vice-versa. La tendresse (T) c’est la possibilité et le goût de s’intéresser aux souffrants, aux enfants, aux faibles, aux petits, aux animaux.3 Et là, statistiquement, il y a une différence entre hommes et femmes. Beaucoup plus de femmes tendres que d’hommes tendres (encore que, bien sûr, il y ait des couples où Mr est tendre tandis que Mme est non-tendre).
Et c’est là qu’est le nœud de la question en ce qui concerne le GENRE. « Homme et femme Il les créa… » plus proches qu’on ne le dit. Et cela est évident depuis que la force physique, apanage évident de l’homme, a tellement perdu de son importance, et que les femmes concurrencent si remarquablement bien les hommes. Et trop longtemps on a attribué à la nature ce qui était dû surtout à la culture (que de révérends pères ont commis cette erreur ! J’en ai été agacé dans ma jeunesse quand je lisais des livres « pieux » où je ne me reconnaissais guère dans ce que disaient les auteurs confondant non seulement la nature et la culture, mais aussi la personne et la fonction.
La fonction maternelle de la femme a paru jusqu’au 20e siècle si fondamentale qu’elle a occulté souvent la personne. Les féministes les plus radicales ont refusé de reconnaître cette fonction (parfois jusqu’à oublier qu’à elles comme aux autres la physiologie la rappelle chaque mois pendant plusieurs décennies).
La personne, qui englobe cette fonction, mais qui la transcende est assurément plus importante (destinée, pour les chrétiens, à vivre en Dieu éternellement). Est-il normal, pour autant de nier cette fonction ? La refuser pour soi est un choix.
La nier est une aberration.
La fonction maternelle n’est pas la fonction d’une pondeuse. Si l’on est mère, on est mère pour longtemps : le petit d’homme naît inachevé. Il doit tout apprendre. L’instinct lui enseigne peu. La parole est indispensable à son apprentissage, et aussi l’imitation. L’imitation des gens que l’on aime, en qui on a confiance. La théorie du « genre » empêchera-t-elle les petits garçons de vouloir ressembler à leur papa s’ils l’aiment et l’admirent ? Empêchera-t-elle les petites filles de ressembler à leur maman si elles l’aiment et l’admirent ? C’est un des aspects de l’éducation, celui qui peut rendre heureux de ce que l’on est.
Les chrétiens peuvent le dire joyeusement.
Ils peuvent dire aussi que le christianisme a libéré les femmes longuement et presqu’universellement « écrasées » par l’homme : « Toi aussi tu es une personne que Dieu aime. » Qui dit cela mieux que l’Evangile ?
La parabole des talents est pour les femmes comme pour les hommes. Aller jusqu’au bout de ses possibilités n’est pas encore tout à fait possible à toutes les femmes.
Soyons reconnaissons aux plus « engagées » des féministes de le dire. Mais ne les suivons pas pour autant sur le chemin du GENRE, car le genre ne peut être qu’une CONTREFAÇON.
Marie-Madeleine Martinie