Recteur du sanctuaire de Lourdes depuis le 1er octobre 2019, Mgr Olivier Ribadeau Dumas achèvera cet été son mandat de trois ans, fortement marqué par la crise sanitaire.
Recueilli par Arnaud Bevilacqua, La Croix du 6 mai 2022
La Croix : Quel bilan faites-vous de votre mission de recteur du sanctuaire de Lourdes alors que votre mandat prendra fin cet été ?
Mgr Olivier Ribadeau Dumas : D’abord, pour un prêtre, être recteur du sanctuaire de Lourdes constitue un ministère magnifique, d’annonce de l’Évangile, au plus près des plus pauvres en lien avec des pèlerins du monde entier. La mission, passionnante, est d’une richesse infinie. Il s’agit d’animer et de donner une âme à la pastorale du sanctuaire et tout en gérant la communauté de travail.
Pendant ces trois ans, le message de Lourdes a pris une acuité toute particulière. Durant cette période de Covid-19, nous avons perçu combien Lourdes a été un soutien pour beaucoup par la prière qui s’y déroulait. Cette période a permis au sanctuaire de renforcer ses fondamentaux et, en même temps, de se renouveler profondément. J’ai essayé de permettre une articulation harmonieuse entre les missions des chapelains avec celles des laïcs et que la pastorale soit au cœur de la vie du sanctuaire.
Quels sont les enseignements pour le sanctuaire de cette crise sanitaire qui l’a privé de ses pèlerins ?
Mgr O. R. D. : La fermeture du sanctuaire a été un événement historique qui a remis la grotte de Massabielle au centre, notamment par le déploiement des moyens audiovisuels pour la retransmission de la messe et du chapelet. Cette période a été aussi une période de renouvellement car elle a fait apparaître des éléments déjà sous-jacents, comme le nombre de pèlerins individuels, qui étaient auparavant cachés par la masse des pèlerinages organisés.À lire aussiLe sanctuaire de Lourdes se projette dans l’après Covid
Nous avons mis en place une pastorale renouvelée pour aller à la rencontre de ces pèlerins-visiteurs. Lourdes est sortie de la mémoire collective de notre société. Notre mission est de permettre aux gens de découvrir ce qu’est Lourdes quand ils ne viennent que trois ou quatre heures.
La crise nous a permis de nous rendre compte que la grâce unique de Lourdes ne pouvait pas être enfermée entre les grilles du sanctuaire mais qu’il fallait la porter à l’extérieur, avec le pèlerinage des reliques de sainte Bernadette ou les missions Notre-Dame de Lourdes (1). Si les pèlerins ne peuvent pas venir, c’est Lourdes qui vient à eux. Par ailleurs, la dimension internationale s’est aussi développée alors même que les pèlerins ne pouvaient pas venir.
Comment se porte le sanctuaire aujourd’hui ?
Mgr O. R. D. : Je suis extrêmement confiant et optimiste pour l’avenir de Lourdes, sur le désir des pèlerins de revenir et sur le fait qu’il nous reste encore beaucoup à faire pour accueillir de nouveaux pèlerins. Le modèle des pèlerinages tels que nous les connaissons aujourd’hui doit évoluer, comme les hospitalités. Comment accueillir les malades psychiques ? Comment accueillir les personnes précaires et les plus fragiles ? Les chantiers sont prometteurs. Si 2022 ne sera pas encore une année normale, 2023 sera très belle.À lire aussiPremière visite de Mgr Jean-Marc Micas à Lourdes
Le sanctuaire est désormais national, marqué par une clarté des responsabilités, de l’évêque, du recteur et du directeur du sanctuaire. Un conseil économique pour le sanctuaire entoure l’évêque et un conseil épiscopal d’orientation l’assiste dans la réflexion. C’est un signe très important que les évêques de France soient associés aux réflexions sur le sanctuaire.
Bientôt loin de Lourdes, quel attachement allez-vous conserver avec le sanctuaire ?
Mgr O. R. D. : Je suis plein de mélancolie, car ma mission a été délicate mais riche. Je garde une admiration et un émerveillement devant la foi des plus petits. Je me souviens pendant le confinement, quand le sanctuaire était fermé, des gens venant prier devant les grilles ou quand, le 11 février dernier, j’ai pu rouvrir l’accès à la grotte et que je suis entré avec une personne en fauteuil. Cette piété populaire, qui pourrait paraître superstitieuse pour certains, est tellement l’expression d’un cœur qui déborde de confiance que cela m’émeut beaucoup.
(1) Les missions Notre-Dame de Lourdes permettent de vivre dans son diocèse, avec un chapelain du sanctuaire, l’expérience de Lourdes (procession eucharistique et procession aux flambeaux, enseignements…).