Témoignage au synode sur la spiritualité conjugale
Arturo et Hermelinda As Zamberline
Tout d’abord, nous souhaitons manifester notre reconnaissance au Saint Père pour la confiance qu’il a eu en nous invitant. Nous en sommes extrêmement honoré. Toutefois, nous ne cachons pas notre appréhension devant une si grande responsabilité. Nous tenons d’abord à dire que nous sommes ici comme couple avec notre manière de vivre familiale et pastorale.
Nous ne sommes ni théologiens, ni spécialisés dans un sujet précis mais nous plaçons notre confiance en Dieu et cela nous procure la paix…
Nous nous présentons : Hermelinda et Arturo, Brésiliens, mariés depuis 41 ans. Nous avons 3 enfants, une belle-fille et une petite-fille. Nous appartenons au mouvement des Equipes Notre Dame (END) depuis 1994. Actuellement, nous sommes responsables du mouvement des Equipes Notre Dame au Brésil.
Le charisme de ce mouvement est la spiritualité conjugale. Ce mouvement existe depuis 1938 et est présent dans 70 pays. On dénombre 137 200 membres dans le monde dont 45 000 dans notre pays.
Nous avons été sollicités pour intervenir sur le sujet suivant : « L’ouverture des conjoints à la vie », thème extrait de la 3ème partie du chapitre 1 du document de travail, « Instrumentum Laboris », du synode.
Nous allons commencer par une citation de la Sainte Ecriture : « Dieu créa l’être humain à son image, Homme et Femme Il les créa. Dieu les bénit et leur dit : soyez fécond et multipliez-vous, remplissez la terre et soumettez là ! » (Gn 1,27-28).
Dieu nous a créé homme et femme pour que nous nous unissions en une seule chair, pour que nous nous aimions d’un Amour qui vient de Dieu lui-même, pour nous édifier mutuellement à travers cet amour et pour que nous donnions la vie (1).
A aucun couple, il n’est permis de garder pour lui-même les grâces et les fruits merveilleux de la vie conjugale. Rappelant la mission de notre mouvement ; aider les couples à se sanctifier, le Père Caffarel, notre fondateur affirmait : « aucun couple n’a un droit à être stérile » (2).
Logiquement, la stérilité se résume pas à ne pas engendrer d’enfants. Nous le comprenons comme une posture délibérément fermée au don créatif de Dieu. Ce don qui peut s’exprimer dans les différentes dimensions de l’amour conjugal.
En effet : « en transmettant la vie humaine, l’homme et la femme, comme époux et parents, coopèrent d’une façon unique à l’œuvre du Créateur » (3).
L’acte sexuel est légitime, cher et béni par Dieu, et le plaisir qui en découle contribue à la joie de vivre et à la structuration saine de la personnalité. Il est l’expression de l’amour, qui au commencement peut-être un « amour-passion », mais qui doit s’humaniser à chaque fois davantage.
Dans l’acte conjugal, les époux expriment avec le corps ce qu’ils ont au cœur. Pour arriver à l’harmonie, il est nécessaire de savoir cultiver le désir, même un érotisme sain. Il est nécessaire de continuer à se passionner et à être attentif l’un pour l’autre (4). La manière de vivre la vie sexuelle est très importante pour l’humanisation de l’être humain.
Le Père Caffarel proposa un parcours fascinant : de la sexualité à l’amour. Le couple est le lieu où s’articulent les trois rôles de la sexualité : son rôle relationnel, son rôle de plaisir et son rôle de fécondité. Le couple se construit en intégrant de manière équilibrée ces trois dimensions.
La sexualité est vécue dans la relation avec le prochain et avec Dieu. Elle est appelée à devenir un langage d’amour, de communion et de vie (5).
Une chose qui s’impose : il est absolument nécessaire de guider les couples vers la perfection humaine et chrétienne de la relation sexuelle. La sexualité est un facteur de sanctification, et actuellement, elle a besoin d’être sauvée de l’érotisme vicié qui réduit l’être humain a une unique dimension (6).
L’engendrement d’enfants est un geste sublime d’amour par le don de la vie. C’est rendre possible à un nouvel être l’aventure formidable de la vie, de l’amour, de la découverte, de la rencontre et de l’union finale dans le cœur de Dieu qui est la réalisation suprême de tout être.
Le couple n’est pas seulement fécond parce qu’il engendre des enfants, mais parce qu’il s’aime, et s’aimant, s’ouvre à la vie. Cela est différent de ceux, qui par libre choix, égoïstement, décident de ne pas accueillir la vie (7). « Le rôle fondamental du mariage et de la famille est d’être au service de la vie »8 et, pour cela, « tout acte conjugal doit demeurer ouvert à la transmission de la vie » (9).
Pour des raisons justes, sans égoïsme, les époux peuvent vouloir espacer la naissance d’enfants, cherchant ainsi une maternité et une paternité responsable (10). Continence périodique et régulation des naissances basée sur l’auto-observation sont en accord avec les critères objectifs de la moralité (11).
Etant donné le sérieux de notre rencontre, nous devons admettre sans peur que beaucoup de couples catholiques – moins ceux qui cherchent à vivre sérieusement leur mariage -, ne se sentent pas obligés à n’utiliser que les méthodes naturelles. Dans les Equipes Notre Dame, cela n’est pas différent. Nous devons ajouter encore que généralement ils ne sont pas questionnés par les confesseurs. D’un coté, les couples sont ouvert à la vie et rejettent l’avortement, cela est un fait. D’un autre coté, nous ne percevons pas dans les prédications et dans les accompagnements spirituels d’insistance sur la doctrine d’Humanae Vitae.
Le contrôle de la natalité par les méthodes naturelles est théoriquement bon, mais, dans la culture actuelle il paraît peu pratiqué. Des couples, principalement jeunes, vivent un rythme de vie qui ne leur permet pas de pratiquer ces méthodes, sachant qu’elles demandent un temps d’entraînement, et le temps est une chose rare dans le monde où nous vivons. Et le pire : pour être superficiellement expliquée et, pour cela même mal utilisée, la méthode naturelle gagne la réputation injuste de n’être pas sûre et ainsi, bien des fois inefficace. Par conséquent, une fois de plus avec sincérité, nous admettons qu’elle n’est pas suivie par la majorité des couples catholiques.
Comme le contrôle des naissances est une véritable nécessité, les couples, dans leur grande majorité, ne rechignent pas à l’usage des autres moyens de contraception. En général, ils ne les considèrent pas comme un problème moral. Nous devons de nouveau considérer que les relations sexuelles sont orientées à la transmission de la vie, mais aussi au service de l’amour conjugal. « Il n’y a rien de surprenant à cela, ayant en vue les exigences de la loi quant à la force de l’instinct sexuel. Mais ce qui n’est pas normal, c’est qu’un grand nombre de couples catholiques soit noyé dans cette angoisse » (12).
Il y a quelques années, le mouvement END a élaboré un thème d’étude intitulé : «Evangéliser la sexualité ». Dans ce document nous constatons la différence entre la doctrine morale et la pratique du couple. Afin de traiter ce sujet important, a été initiée dans le Mouvement une étude basée sur les catéchèses de la Théologie du Corps, de Saint Jean-Paul II, intitulée « La Théologie de la Sexualité ».
Saint Père, Pères synodaux, mesdames et messieurs, si au moins les couples rencontraient lumière et appui auprès des clercs, cela serait déjà un grand pas en avant ! Très souvent, les conseils contradictoires ne font qu’aggraver la confusion. Nous prions le magistère de donner rapidement aux prêtres et aux fidèles les grandes lignes pour une pédagogie pastorale qui aide à adopter et à observer les principes en accord avec Humanae Vitae (13).
(c) Traduction par Séverine Jahan (END, France) et le P. Julien Brissier