Écouter l’homélie du dimanche 4 juin 2017, fête de la Pentecôte, à la paroisse Saint Aubin (72).
Un peu d’histoire
Chaque année, sept semaines après Pâques, les Chrétiens commémorent la descente du Saint-Esprit sur les apôtres lors de la Pentecôte. Un nom qui n’a cessé d’évoluer au fil des siècles, en miroir de celui de la fête du don de la Torah dans la religion juive.
Cinquante jours exactement après Pâques ou Paque -dans la religion juive- la Pentecôte fait son grand retour dans le calendrier. Célébrée en 2016 au mois de mai, la fête religieuse s’ouvre cette année le dimanche 4 juin. Mais pourquoi commémore-t-on cette date? En quelque onze siècles, la commémoration a été corrigée, rectifiée, révisée puis épurée pour donner l’écriture qu’on lui connaît. Mais d’où vient son nom? Le Figaro revient sur les origines sémantiques du terme catabatique.
Un petit cours d’histoire et d’étymologie s’impose. Commençons donc par le commencement et ouvrons les thésaurus. Selon le Petit Robert, la Pentecôte se réfère à deux fêtes religieuses: chrétienne et juive. Chez ces premiers croyants, la célébration orthographiée «pentecostem» désigne, depuis la fin du Xe siècle, la «fête chrétienne célébrée le septième dimanche après Pâques commémorant la descente du Saint-Esprit sur les apôtres.»
Attestée dans le dictionnaire dès le XVIe siècle, la fête juive caractérise quant à elle la «fête du don de la Torah». Autrement appelé Chavouot (semaine) en hébreu, elle commémore plus précisément indique le CNRTL: «La Révélation du Sinaï». Un événement qui coïncidait avec «la fin de la moisson» et qui était «marqué par la présentation au Temple de Jérusalem de deux pains faits du froment nouveau ainsi que de l’offrande des prémices, sept «espèces» parmi lesquelles le blé et l’orge nouveaux.» D’où sa célébration «sept semaines» après le second jour de Pâque!
Qu’en est-il donc de son écriture? Pourquoi la Pentecôte s’appelle-t-elle ainsi? Du latin ecclésiastique pentecoste, issu du grec pentekoste (cinquantième) et traduit de l’hébreu shabhu oth «fête des Semaines», la Pentecôte -toujours écrite avec une majuscule- signifie littéralement «cinquantième jour après la Pâque».
Attestée depuis 980 dans le dictionnaire français sous la forme latine «pentecostem», la Pentecôte a vu sa graphie progressivement évoluer à travers les siècles. Au début du XIIe siècle, l’usage l’écrit pentecuste, tandis qu’à sa fin, il lui enlève son «u» pour «pentecoste». La locution connaîtra quelques changements entre le XVIe et le XVIIe avant de prendre la graphie qu’on lui connaît désormais dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle.
Notons que la fête religieuse possède ses équivalents à l’étranger. Le Littré note ainsi qu’en provençal, la Pentecôte s’écrit pentecosta, en espagnol pentecostes et en italien pentecosta.
Précisons enfin, pour l’anecdote, que la pentecôte -orthographiée cette fois-ci sans majuscule- désigne également «une petite orchidée de couleur rose ou violette, de forme pyramidale, qui croît dans les prairies.»
Homélie du pape François
Se conclut aujourd’hui le temps de Pâques, cinquante jours qui, de la Résurrection de Jésus à la Pentecôte, sont marqués de manière spéciale par la présence de l’Esprit Saint. C’est lui, en effet, le Don pascal par excellence. C’est l’Esprit créateur, qui réalise toujours des choses nouvelles. Deux nouveautés nous sont montrées dans les Lectures d’aujourd’hui: dans la première, l’Esprit fait des disciples un peuple nouveau; dans l’Évangile, il crée dans les disciples un cœur nouveau.
Un peuple nouveau. Le jour de Pentecôte, l’Esprit est descendu du ciel, sous forme de «langues qu’on aurait dites de feu, qui se partageaient, et il s’en posa sur chacun […]. Tous furent remplis d’Esprit Saint: ils se mirent à parler en d’autres langues» (Ac 2, 3-4). La Parole de Dieu décrit ainsi l’action de l’Esprit, qui se pose d’abord sur chacun et ensuite met tous en communication. Il fait à chacun un don et réunit tous dans l’unité. En d’autres termes, le même Esprit crée la diversité et l’unité et, ainsi, façonne un peuple nouveau, diversifié et uni: l’Église universelle. D’abord, avec imagination et de manière imprévisible, il crée la diversité; à chaque époque, en effet, il fait fleurir des charismes nouveaux et variés. Ensuite, le même Esprit réalise l’unité: il relie, réunit, recompose l’harmonie: «Par sa présence et son action, il réunit dans l’unité les esprits qui sont distincts les uns des autres et séparés» (Cyrille d’Alexandrie, Commentaire sur l’évangile de Jean, XI, 11). En sorte qu’il y ait l’unité vraie, celle selon Dieu, qui n’est pas uniformité, mais unité dans la différence.
Pour réaliser cela, il convient de nous aider à éviter deux tentations récurrentes. La première, c’est celle de chercher la diversité sans l’unité. Cela arrive quand on veut se distinguer, quand on crée des coalitions et des partis, quand on se raidit sur des positions qui excluent, quand on s’enferme dans des particularismes propres, jugeant peut-être qu’on est meilleur ou qu’on a toujours raison. Ce sont les soi-disant ‘‘gardiens de la vérité’’. Alors, on choisit la partie, non le tout, l’appartenance à ceci ou à cela avant l’appartenance à l’Église; on devient des ‘‘supporters’’ qui prennent parti plutôt que des frères et sœurs dans le même Esprit; des chrétiens ‘‘de droite ou de gauche’’ avant d’être de Jésus; des gardiens inflexibles du passé ou des avant-gardistes de l’avenir avant d’être des enfants humbles et reconnaissants de l’Église. Ainsi, il y a la diversité sans l’unité. La tentation opposée est en revanche celle de chercher l’unité sans la diversité. Cependant, ainsi, l’unité devient uniformité, obligation de faire tout ensemble et tout pareil, de penser tous toujours de la même manière. De cette façon, l’unité finit par être homologation et il n’y a plus de liberté. Mais, dit saint Paul, «là où l’Esprit du Seigneur est présent, là est la liberté» (2 Co 3, 17).
Notre prière à l’Esprit Saint, c’est alors de demander la grâce d’accueillir son unité, un regard qui embrasse et aime, au-delà des préférences personnelles, son Église, notre Église; de prendre en charge l’unité de tous, de mettre fin aux bavardages qui sèment la division et aux envies qui empoisonnent, car être des hommes et des femmes d’Église signifie être des hommes et des femmes de communion; c’est de demander également un cœur qui sente l’Église notre mère et notre maison: la maison accueillante et ouverte, où on partage la joie multiforme de l’Esprit Saint.
Et venons-en à la seconde nouveauté: un cœur nouveau. Jésus Ressuscité, en apparaissant pour la première fois aux siens, dit: «Recevez l’Esprit Saint. À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis» (Jn 20, 22-23). Jésus ne condamne pas les siens, qui l’avaient abandonné et renié durant la passion, mais il leur donne l’Esprit du pardon. L’Esprit est le premier don du Ressuscité et il est donné avant tout pour pardonner les péchés. Voilà le commencement de l’Église, voilà la colle qui nous maintient ensemble, le ciment qui unit les briques de la maison: le pardon. Car, le pardon est le don à la puissance n, c’est le plus grand amour, celui qui garde uni malgré tout, qui empêche de s’effondrer, qui renforce et consolide. Le pardon libère le cœur et permet de recommencer: le pardon donne l’espérance; sans pardon l’Église ne s’édifie pas.
L’Esprit du pardon, qui résout tout dans la concorde, nous pousse à refuser d’autres voies: celles hâtives de celui qui juge, celles sans issue de celui qui ferme toutes les portes, celles à sens unique de celui qui critique les autres. L’Esprit nous exhorte, au contraire, à parcourir la voie à double sens du pardon reçu et du pardon donné, de la miséricorde divine qui se fait amour du prochain, de la charité comme «unique critère selon lequel tout doit être fait ou ne pas être fait, changé ou pas changé» (Isaac de l’Étoile, Discours 31). Demandons la grâce de rendre toujours plus beau le visage de notre Mère l’Église en nous renouvelant par le pardon et en nous corrigeant nous-mêmes: ce n’est qu’alors que nous pourrons corriger les autres dans la charité.
Demandons-le à l’Esprit Saint, feu d’amour qui brûle dans l’Église et en nous, même si souvent nous le couvrons de la cendre de nos péchés: ‘‘Esprit de Dieu, Seigneur qui te trouves dans mon cœur et dans le cœur de l’Église, toi qui conduis l’Église, façonne-la dans la diversité, viens! Pour vivre, nous avons besoin de Toi comme de l’eau: descends encore sur nous et enseigne-nous l’unité, renouvelle nos cœurs et enseigne-nous à aimer comme tu nous aimes, à pardonner comme tu nous pardonnes! Amen’’.