Tentations des satisfactions sensibles : priorité aux nourritures spirituelles
« Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. » La première tentation faite à Jésus est celle du matérialisme : se servir de sa puissance divine pour satisfaire ses besoins matériels. Sa réponse, puisée au livre du Deutéronome, souligne le choix de faire prévaloir l’accueil de la Parole de Dieu sur la satisfaction des besoins matériels sensibles, la primauté de l’être sur l’avoir. « Il est écrit : ce n’est pas seulement de pain que l’homme doit vivre, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu ». Regardons aussi Marie qui s’est tout entière offerte à l’accueil de la Parole ; avec elle, demandons la grâce d’être habités par la Parole divine.
Tentations de la gloire et du prestige : priorité à l’humilité de l’obéissance
« Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. » La seconde tentation faite à Jésus est celle du paraître et de l’orgueil : se servir de sa puissance divine pour acquérir le prestige et la gloire auprès des hommes. Sa réponse est claire : l’humilité de l’obéissance ; préférer la confiance envers le Père plutôt que le merveilleux auprès des hommes. « Il est encore écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu ». Regardons aussi Marie qui a vécu dans l’obéissance, et le plus souvent une vie cachée ; avec elle, demandons la grâce de pouvoir suivre Jésus sur le chemin de la confiance et de l’abandon.
Tentations de la volonté de puissance : priorité à l’adoration et à l’abaissement du service
« Tout cela, je te le donnerai, si tu te prosternes pour m’adorer ». La troisième tentation faite à Jésus est celle de la volonté de puissance : se servir de sa puissance divine pour obtenir la royauté mondiale. Sa réponse exprime son choix de l’humble service de Dieu à l’encontre de tout espoir de domination terrestre. Elle exclut aussi tout compromis, tout partage de puissance avec Satan : « Arrière Satan, car il est écrit : C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, et c’est lui seul que tu dois adorer. » Regardons aussi Marie, abandonnée à la volonté du Père ; avec elle, demandons la grâce de l’humilité et du service.
Marie en sa réponse à l’ange Gabriel synthétise cette triple réponse
– « Je suis la servante du Seigneur » : le service, réponse à la 3° tentation ; Marie adore.
– « Qu’il me soit fait » : l’obéissance, réponse à la 2° tentation ; Marie s’humilie.
– « Selon ta Parole » : l’accueil de la Parole, réponse à la 1° tentation ; Marie écoute.
Écouter prioritairement la Parole de Dieu, l’appliquer en vivant l’humilité de l’obéissance, et par là, faire de sa vie une adoration de Dieu seul et un service des autres : voilà le chemin de sainteté édicté par Jésus, vécu par Marie, et proposé à notre conversion de Carême.
Les vœux religieux comme triple réponse
Pauvreté, chasteté, obéissance (cf. Lc 14, 25-35). La pauvreté ouvre à la Parole ; l’obéissance fait entrer dans l’humilité ; la chasteté nous voue au service de Dieu et des hommes. Ce sont les trois racines de la réponse d’amour à Dieu. Ceux qui vivent les trois vœux dans la vie religieuse, apparemment privée de fruits, manifestent ces racines de l’amour, et montrent à tous que l’amour pour Dieu, qu’on soit consacré, célibataire, marié, veuf… se vit, par chacun à sa place, dans la pauvreté, l’obéissance, la chasteté. Marie en est le premier exemple.
Au long du Carême, nous lisons le livre du Deutéronome
Le Deutéronome, littéralement « deuxième loi », est l’œuvre de lévites, voués au service du culte. Ils avaient recueilli des lois et des coutumes, mises par écrit dans le royaume du Nord, avant la chute de sa capitale, Samarie, survenue en 721 av. J.-C. Le « deutéronomiste » s’est interrogé sur les raisons de la chute du royaume d’Israël et, dans son ultime rédaction du livre propose une réflexion sur l’attitude du peuple. Invitant à la conversion, il fait méditer le comportement des Hébreux durant l’Exode et indique les réponses que le peuple, éprouvé au désert, aurait dû donner à son Dieu, au lieu de « murmurer » contre lui1.
Quand Matthieu ouvre le drame de Jésus avec le récit des tentations, des paroles du Deutéronome sont placées sur les lèvres de Jésus. Par les réponses qu’il donne au tentateur, Jésus montre à quelles tentations de l’Exode il est fait référence. Ainsi s’entremêlent, dans le récit de Matthieu, tentations du peuple hébreu et tentations faites à Jésus ; mauvaises réponses du peuple, et bonnes réponses de Jésus. C’est lui qui donne à son Père la réponse qu’il attendait d’Israël, et il nous invite à le suivre.
1 https://petiteecolebiblique.fr/94-murmurer-contre-dieu/