Un tout petit mensonge… plus jamais !

Dominique Auzenet

J’étais jeune prêtre à l’époque. Un jour, une famille me téléphone pour m’inviter à dîner. Elle voulait me parler. J’ouvre mon agenda, et nous cherchons une date propice. Difficile à trouver en soirée…

Nous finissons par nous mettre d’accord sur une date, que j’avais déjà réservée pour emmener les catéchistes de la paroisse voir au cinéma le film « Jésus de Nazareth » de Zefirelli, qui venait de sortir. La séance commençait à 20h30, et je me disais que je pourrais arriver à faire les deux dans la même soirée. Je m’entends leur dire au téléphone : « d’accord pour telle date, mais j’ai une réunion à 20h30 ». Pas tout à fait faux, puisque cette « réunion » concernait la paroisse et non pas mes loisirs personnels. Pas tout à fait vrai non plus, puisqu’il ne s’agissait pas d’une réunion, mais d’une séance de cinéma…

Le jour dit, j’arrive dans la famille en question à 19h, de sorte à prévoir large. Surprise ! C’était une famille de 9 enfants (si je me souviens bien), et ils commençaient à faire dîner les enfants, de sorte que nous puissions ensuite dîner en parlant librement. Le temps tourne, 19h15, 19h30, 19h45, et je me permets de leur rappeler qu’à 20h30 j’avais une « réunion » et que je devrais partir un peu avant…

Nous nous sommes mis à table après 20h. Ils souhaitaient que je puisse devenir conseiller spirituel de secteur des Équipes Notre-Dame du diocèse. Ce fut le début d’une belle collaboration qui dura six ans. Vers 20h25, je me suis excusé, partant vers la « réunion », laissant le dessert et mes hôtes en plan…

Le temps de passer chercher en voiture les différentes catéchistes, nous sommes arrivés au cinéma vers 21h. La séance était commencée, les lumières étaient éteintes, nous nous sommes dirigés vers les places libres au premier rang…

Arrive l’entracte. Les lumières se rallument. Qui pensez-vous que j’aie vu sur ma droite ? Le couple que j’avais quitté plus d’une heure auparavant… Moment de surprise… Ils s’étaient dit : « Chouette, on a une soirée imprévue de libre, on va aller voir le film « Jésus de Nazareth »…

Ah, là là… situation très gênante… Heureusement, il y avait les catéchistes entre deux… Je m’enfonce dans mon siège et regarde à gauche… Bref, il n’était pas question de se faire remarquer, ni de se lever pour passer aux toilettes…

Curieuse réaction de ma part tout de même ! J’en ai tellement eu honte (voyez l’ego surdimensionné) que j’en ai reçu comme un électrochoc ! Pourquoi rajouter à un demi-mensonge une dissimulation ?

J’ai dû m’expliquer avec eux quelque temps plus tard. Cet épisode, qui a été marquant dans ma vie, a agi comme un véritable vaccin pour sécréter des anticorps contre le mensonge. Quarante ans plus tard : je n’arrive pas à me résoudre aux demi-mensonges…

Je reste intimement convaincu qu’il n’y a pas de petit mensonge. Toute altération de la vérité nous place sur la pente savonneuse du mensonge tout court, de la dissimulation, et donc du péché. Impossible pour le chrétien, à plus forte raison pour un prêtre. Soyons toujours vrais, quoi qu’il nous en coûte.

Une étude biblique à parcourir