Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie

Il y a demeures et Demeure

Le chapitre 14 de St Jean s’articule en deux parties autour d’un mot qui lui est cher : le verbe demeurer, très présent en Jean sous la forme « demeurer en », notamment dans la première lettre. Et le substantif demeure (monè en gr.), présent seulement deux fois dans l’évangile, ici au ch. 14, comme s’il invitait à une double partition : notre demeure dans la maison du Père (vv. 2-14) et le Père fait sa demeure en nous (vv. 15-29). Avec l’invitation à ne pas se troubler et à croire qui ouvre (14,1) et ferme (14, 27-29) l’une, puis l’autre partie. En effet, l’heure est grave, puisque Jésus va vers le Père (14, 12.28) qui va envoyer l’Esprit (14, 16.17.26), l’autre Paraclet.

Marcher vers l’au-delà

Les premiers versets du ch. 14 sont une magnifique catéchèse sur l’au-delà. Jésus parle de l’au-delà en termes de lieux : maison de mon Père au singulier, nombreuses demeures, au pluriel, et de place à préparer. Mais aussi en termes d’aller et de retour : c’est lui qui va préparer une place pour chacun, c’est lui qui va venir à nouveau, pour nous prendre près de lui. C’est comme s’il voulait nous dire qu’il prend un soin tout particulier pour chacun(e) de nous, que nous aurons une demeure personnalisée dans l’unique Maison du Père. Et c’est « afin que là où je suis, vous aussi, vous soyez » (v. 3c) ; et il le demandera ensuite dans la grande prière pour l’avenir de son Église : « Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils soient eux aussi avec moi, et qu’ils contemplent ma gloire » (17, 24).

Écouter l’homélie

Ne pas ignorer le but, ni le chemin

Jésus a tracé à ses disciples un chemin de sainteté, il leur a montré la voie spirituelle sur laquelle ils doivent maintenant s’avancer. Mais ils ne comprennent pas très bien.« Pour aller où je vais, vous savez le chemin », leur dit Jésus (Jn 14, 4). Thomas, le premier, dit à haute voix ce que les autres pensent tout bas : « Seigneur, nous ne savons même pas où tu vas ; comment pourrions-nous savoir le chemin ? » (Jn 14, 5). « Seigneur, où vas-tu ? » avait déjà interrogé Pierre (13, 36). Bref, la perplexité est générale, personne ne sait rien du chemin et du but vers lequel Jésus s’avance ! Un peu plus tard, Jésus renchérit : « Je m’en vais maintenant auprès de Celui qui m’a envoyé, et aucun de vous ne me demande : « Où vas-tu ? » » (16, 5). Façon un peu ironique de dire qu’ils sont noyés dans l’ignorance et la tristesse.

S’enraciner en Jésus Chemin, Vérité et Vie

La réponse fameuse de Jésus à Thomas a profondément marqué le christianisme : « Je suis le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14, 6). Jésus invite Thomas (les apôtres et nous-mêmes) à le suivre en toute chose. Il nous invite à nous ancrer en lui par la foi, de sorte à avancer aussi par la foi, vers la Maison du Père. Liturgiquement parlant, nous avons ce dimanche une suite de l’évangile du Bon Pasteur : « il marche à leur tête, et les brebis le suivent », et encore : « Moi, je suis venu pour que les brebis aient la vie, la vie en abondance » (Jn 10, 10).

Nous trouvons aussi dans la contemplation du Ressuscité ce dimanche un accomplissement des trois évangiles de Carême. Souvenons-nous : Jésus est le Chemin parce qu’il marche vers nous, s’arrêtant à notre puits de Jacob pour nous donner l’eau vive de son Esprit, comme à la Samaritaine. Il est la Vérité qui illumine nos vies de sa Lumière, afin de nous mener vers la foi par le baptême, comme l’aveugle-né. Il est la Vie, la vie éternelle dès maintenant, et la résurrection promise dans le monde céleste qui nous attend, dans la maison du Père, comme il le montre par le retour à la vie de Lazare. Si bien que la question de Philippe : « Seigneur montre nous le Père » n’a plus beaucoup de sens. Nous attacher à Jésus est l’essentiel : « Qui m’a vu a vu le Père » (14, 9) ; « Je suis dans le Père et le Père est en moi » (14, 11).