L’Église vit actuellement une époque de « réveil », notamment par l’apparition du courant charismatique. La prière où l’on demande « l’effusion de l’Esprit » réveille en nous la vie dans l’Esprit en son sens le plus large. Nous recevons les charismes ; et l’Esprit Saint agit aussi de façon nouvelle à travers tous les dons sanctifiants. Ceci nous aide à mieux comprendre la relation entre les sacrements de baptême, de confirmation, et l’effusion charismatique de l’Esprit.
Baptême et confirmation sont deux sacrements non réitérables. On ne les reçoit qu’une seule fois. Cependant, le chrétien est appelé à en vivre concrètement l’actualité, notamment par des « réveils » successifs tout au long de sa vie. On peut donc parler « des » effusions de l’Esprit, au pluriel. Celles-ci sont loin d’être limitées au contexte du Renouveau charismatique (heureusement !). Le conseil de saint Paul à Timothée est valable pour tous, et en bien des circonstances différentes : « Je t’invite à raviver le don spirituel que Dieu a déposé en toi par l’imposition des mes mains » (2 Tm 1,6).
Pour l’instant, beaucoup de chrétiens ont vécu le sacrement de confirmation sans être vraiment conscients de la grâce reçue. La démarche personnelle d’effusion de l’Esprit, vécue à travers le réveil spirituel du Renouveau qui marque l’étape actuelle de l’Église, est une façon de réactualiser l’initiation chrétienne, et spécialement « d’habiter » son propre sacrement de confirmation.
La grâce du Baptême dans l’Esprit, ce sont bien nos sacrements de baptême et de confirmation, reçus avec foi, et épanouis jusque dans leur dimension charismatique. Il n’y a pas d’autre « baptême dans l’Esprit ».
L’Esprit Saint, de sa libre initiative, peut donner à une personne non confirmée de recevoir brusquement ce que nous appelons, dans le Renouveau, l’effusion de l’Esprit. Dans ce cas, il faut proposer à cette personne de cheminer vers la réception du sacrement de confirmation, par lequel, en Église, elle sera marquée de l’Esprit Saint de façon indélébile.
C’est pourquoi, il est bon, dans notre réflexion, de nous remémorer en profondeur ce qu’est le sacrement de confirmation.
Le sacrement de la confirmation est le sacrement de la Pentecôte (1)
L’Église née de la Pentecôte est l’Église de l’Esprit. Le Christ lui a donné le sacrement de confirmation pour qu’elle « fasse mémoire » de la Pentecôte. La confirmation est donc le sacrement de la Pentecôte. Elle se réfère à cet événement précis de l’histoire du salut et le rend actuel.
Dans les sacrements, l’Église vit de son événement fondateur (le Christ mort et ressuscité, monté au ciel, d’où il répand l’Esprit) comme un arbre vit de ses racines. Par la célébration du sacrement de confirmation, l’Église :
- * proclame qu’elle est née il y a 2000 ans à Jérusalem, et qu’elle naît constamment de l’Esprit de Pentecôte
- * signifie qu’elle est, comme Église, une « créature nouvelle »: elle n’est pas née, ne naît pas, ne naîtra pas du désir des hommes, mais de l’Esprit
- * se tourne vers l’avenir, et annonce aux hommes que par la puissance de l’Esprit, Dieu sera tout en tous. La confirmation est essentielle comme sacrement de la croissance du Royaume.
Puisque la Pentecôte est la naissance de l’Église comme missionnaire, par la confirmation, l’Église est investie de l’Esprit, et les baptisés sont envoyés dans le monde pour la sanctification des hommes et la transformation du monde « jusqu’à ce que Dieu soit tout en tous ».
La confirmation vient affermir la foi reçue au baptême (1)
Lorsqu’elle est reçue par une personne qui avait été baptisée bébé, la confirmation est ce don de Dieu qui vient affermir chez le baptisé la foi déposée dans son baptême.
Le baptême donne déjà l’Esprit, la confirmation le donne en plénitude. Ces deux sacrements s’appellent l’un l’autre. Comme la naissance appelle la croissance. Ce sont deux rites différents pour deux grâces différentes, mais complémentaires.
* Le baptême est le sacrement que le Christ et l’Église proposent à ceux du dehors pour les introduire « dans la maison », dans le mystère chrétien. La confirmation est celui qu’ils proposent à ceux du dedans pour les habiliter à sortir et à montrer le visage de l’Église.
* Par le baptême, nous devenons des vivants : le baptême nous fait naître de Dieu. Par la confirmation, l’Esprit nous rend vivifiants, contagieux de vie : par le témoignage, nous devenons père et mère spirituels.
* Par le baptême, nous sommes appelés et justifiés, pour être glorifiés (Rm 8,29). Par la confirmation, nous sommes envoyés pour faire des disciples (Mt 28,19) et à cet effet, revêtus de puissance (Lc 24,49 ; Mc 16,17-19).
* Par le baptême, nous devenons disciples, nous écoutons la Parole. Par la confirmation, nous sommes aussi prophètes, l’Église qui annonce Jésus-Christ.
* Par le baptême, l’Église devient une maison, une famille. Par la confirmation, l’Église devient une tâche à accomplir, une communauté à construire.
Confirmer des laïcs, c’est donc les mettre en situation de responsabilité dans l’Église… Présenter ses enfants à la confirmation, c’est accepter de les voir différents, libres et responsables…
En résumé, on peut souligner combien :
* Le baptême est centré sur le Christ : il nous force à prendre le chemin parcouru par le Christ, jusque dans le mystère de sa mort.
* La confirmation est centrée sur l’Esprit : elle nous pousse à prendre les chemins de l’Esprit, car nous devons vivre au jour le jour notre vie baptismale comme l’œuvre de l’Esprit s’accomplissant sans cesse en nous. L’Esprit confirme notre baptême.
Deux traditions : l’Orient et l’Occident (2)
Aux premiers siècles, la Confirmation constitue généralement une unique célébration avec le Baptême, formant avec celui-ci, selon l’expression de saint Cyprien, un « sacrement double ». Parmi d’autres raisons, la multiplication des baptêmes d’enfants, et ce en tout temps de l’année, et la multiplication des paroisses (rurales), agrandissant les diocèses, ne permettent plus la présence de l’évêque à toutes les célébrations baptismales. En Occident, parce que l’on désire réserver à l’évêque l’achèvement du Baptême, s’instaure la séparation temporelle des deux sacrements. L’Orient a gardé unis les deux sacrements, si bien que la Confirmation est donnée par le prêtre qui baptise. Celui-ci cependant ne peut le faire qu’avec le « myron » consacré par un évêque.
Une coutume de l’Église de Rome a facilité le développement de la pratique occidentale, grâce à une double onction du saint chrême après le Baptême : accomplie déjà par le prêtre sur le néophyte, au sortir du bain baptismal, elle est achevée par une deuxième onction faite par l’évêque sur le front de chacun des nouveaux baptisés. La première onction au saint chrême, celle que donne le prêtre, est restée rattachée au rite baptismal ; elle signifie la participation du baptisé aux fonctions prophétique, sacerdotale et royale du Christ. Si le Baptême est conféré à un adulte, il n’y a qu’une onction postbaptismale : celle de la Confirmation.
La pratique des Églises d’Orient souligne davantage l’unité de l’initiation chrétienne. Celle de l’Église latine exprime plus nettement la communion du nouveau chrétien avec son évêque, garant et serviteur de l’unité de son Église, de sa catholicité et de son apostolicité, et par là, le lien avec les origines apostoliques de l’Église du Christ.
Les signes et le rite de la confirmation (2)
Dans le rite de ce sacrement, il convient de considérer le signe de l’onction et ce que l’onction désigne et imprime : le sceau spirituel.
L’onction, dans la symbolique biblique et antique, est riche de nombreuses significations : l’huile est le signe d’abondance et de joie, elle purifie (onction avant et après le bain) et elle rend souple (l’onction des athlètes et des lutteurs) ; elle est signe de guérison, puisqu’elle adoucit les contusions et les plaies et elle rend rayonnant de beauté, de santé et de force.
Toutes ces significations de l’onction d’huile se retrouvent dans la vie sacramentelle. L’onction avant le Baptême avec l’huile des catéchumènes signifie purification et fortification ; l’onction des malades exprime la guérison et le réconfort. L’onction du saint chrême après le Baptême, dans la Confirmation et dans l’Ordination, est le signe d’une consécration. Par la Confirmation, les chrétiens, c’est-à-dire ceux qui sont oints, participent davantage à la mission de Jésus-Christ et à la plénitude de l’Esprit Saint dont Il est comblé, afin que toute leur vie dégage « la bonne odeur du Christ ».
Par cette onction, le confirmand reçoit « la marque », le sceau de l’Esprit Saint. Le sceau est le symbole de la personne, signe de son autorité, de sa propriété sur un objet – c’est ainsi que l’on marquait les soldats du sceau de leur chef et aussi les esclaves de celui de leur maître – ; il authentifie un acte juridique ou un document et le rend éventuellement secret.
Le Christ Lui-même se déclare marqué du sceau de son Père. Le chrétien, lui aussi, est marqué d’un sceau : « Celui qui nous affermit avec vous dans le Christ et qui nous a donné l’onction, c’est Dieu,Lui qui nous a marqués de son sceau et a mis dans nos cœurs les arrhes de l’Esprit » (2 Co 1,22). Ce sceau de l’Esprit Saint, marque de l’appartenance totale au Christ, la mise à son service pour toujours, mais aussi la promesse de la protection divine dans la grande épreuve eschatologique.
La célébration de la confirmation (2)
Un moment important qui précède la célébration de la confirmation, mais qui, d’une certaine façon, en fait partie, est la consécration du saint chrême. C’est l’évêque qui, le Jeudi Saint, au cours de la Messe chrismale, consacre le saint chrême pour tout son diocèse.
(…) Dans le rite romain, l’évêque étend les mains sur l’ensemble des confirmands, geste qui, depuis le temps des apôtres, est le signe du don de l’Esprit. Et l’évêque d’invoquer l’effusion de l’Esprit :
Dieu très bon, Père de Jésus, le Christ, notre Seigneur, regarde ces baptisés sur qui nous imposons les mains : par le Baptême, tu les as libérés du péché, tu les as fait renaître de l’eau et de l’Esprit. Comme tu l’as promis, répands maintenant sur eux ton Esprit Saint ; donne-leur en plénitude l’Esprit qui reposait sur ton Fils Jésus : esprit de sagesse et d’intelligence, esprit de conseil et de force, esprit de connaissance et d’affection filiale ; remplis-les de l’esprit de la crainte de Dieu. Par le Christ, notre Seigneur.
Suit le rite essentiel du sacrement. Dans le rite latin, « le sacrement de Confirmation est conféré par l’onction du saint chrême sur le front, faite en imposant la main, et par ces paroles : « Sois marqué de l’Esprit Saint, le don de Dieu ». Dans les Églises orientales, l’onction du myron se fait après une prière d’épiclèse, sur les parties les plus significatives du corps : le front, les yeux, le nez, les oreilles, les lèvres, la poitrine, le dos, les mains et les pieds, chaque onction étant accompagnée de la formule : « Sceau du don qui est le Saint Esprit ».
Les effets de la confirmation (2)
Il ressort de la célébration que l’effet du sacrement de confirmation est l’effusion plénière de l’Esprit Saint, comme elle fut accordée jadis aux apôtres au jour de la Pentecôte.
De ce fait, la confirmation apporte croissance et approfondissement de la grâce baptismale :
- – elle nous enracine plus profondément dans la filiation divine qui nous fait dire « Abba, Père » (Rm 8,15) ;
- – elle nous unit plus fermement au Christ ;
- – elle augmente en nous les dons de l’Esprit Saint ;
- – elle rend notre lien avec l’Église plus parfait ;
- – elle nous accorde une force spéciale de l’Esprit Saint pour répandre et défendre la foi par la parole et par l’action en vrais témoins du Christ, pour confesser vaillamment le nom du Christ et pour ne jamais éprouver de la honte à l’égard de la Croix.
Comme le Baptême dont elle est l’achèvement, la Confirmation est donnée une seule fois. La Confirmation imprime en effet dans l’âme une marque spirituelle indélébile, le « caractère », qui est le signe de ce que Jésus-Christ a marqué un chrétien du sceau de son Esprit en le revêtant de la force d’en haut pour qu’il soit son témoin.
Le « caractère » perfectionne le sacerdoce commun des fidèles, reçu dans le Baptême, et « le confirmé reçoit la puissance de confesser la foi du Christ publiquement, et comme en vertu d’une charge » (St Thomas d’Aquin).
(1) Ces paragraphes résument certaines pages du livre du P. Th. Rey-Mermet, Croire 2, les sacrements, Ed. Droguet- Ardant, 1977, p. 100 ss.
(2) Texte intégral du Catéchisme de l’Église catholique n° 1290-1305.