Le ciel de notre âme

    Vous aurez entendu dire que Dieu est partout, et c’est très vrai. Mais on dit : là où est le roi, là est la cour, et c’est évident ; et donc là où est Dieu, là aussi est le ciel. Voyez ce que dit saint Augustin : après l’avoir cherché partout, il finit par le trouver en lui-même. (Confessions 10, 27) Croyez-vous qu’il soit sans importance pour une âme dispersée de comprendre cette vérité, et de voir que pour parler à son Père éternel, elle n’a pas besoin d’aller au ciel, et que pour se réjouir avec lui, elle n’a pas besoin de prier à haute voix ?

Si bas qu’elle parle, il l’entendra, et elle n’a pas non plus besoin d’ailes pour aller le chercher : il lui suffit de se mettre en solitude et de regarder en elle-même, sans s’étonner qu’il y ait là un si bon hôte ; qu’avec grande humilité, elle lui parle comme à un père, qu’elle lui fasse ses demandes comme à un père, qu’elle se réjouisse avec lui comme avec un père, tout en sachant qu’elle n’en est pas digne.

    Quand le roi vous fait une faveur, l’humilité ne consiste pas à la refuser, mais à l’accepter en comprenant l’honneur qui vous en revient, et à vous en réjouir. Drôle d’humilité que celle-là ! L’empereur du ciel et de la terre vient chez moi pour me faire une faveur et se réjouir avec moi, et je ne voudrais ni lui répondre, ni rester avec lui, mais je devrais le laisser seul ?

    Comprenez bien cette vérité, c’est important : le Seigneur est au-dedans de nous, et c’est là qu’il nous faut demeurer avec lui.

Sainte Thérèse d’Avila (1515-15), Chemin de la Perfection, ch. 46